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Ferré, secrétaire avec Raoul Rigault, ramasse les notes informes qui seront le procès-verbal. Les gardes de la cour d’honneur crient : « Vive la Commune ! » au passage des élus. Paris s’endormit aux fanfares mourantes ; pour la première fois, depuis le 18 mars, les lumières de l’Hôtel-de-Ville s’éteignirent et les sentinelles n’eurent pas de mot de bataille à échanger.

Le lendemain, Delescluze donna sa démission de député et déclara opter pour le nouveau mandat que lui avait donné Paris ; par contre, Rochard suivit l’exemple de Tirard et se retira. Reprenant la motion de la veille, Raoul Rigault demanda la présidence d’honneur pour Blanqui. Delescluze s’y opposa et Cournet : « À l’égard de Blanqui, nous devons faire quelque chose de plus efficace ». On décida que le bureau serait composé d’un président et de deux assesseurs, de deux secrétaires et renouvelé chaque semaine. Lefrançais fut élu président. Avant de lui céder la place, le père Beslay, d’une voix forte, salua la Commune et définit très heureusement la jeune révolution : « L’affranchissement de la Commune de Paris, c’est l’affranchissement de toutes les communes de la République… Plus vaillants que vos devanciers, vous avez marché et l’on peut compter que la République marchera avec vous. Vos adversaires ont dit que vous frappiez la République… Si nous l’avons frappée, c’est comme le pieu que l’on enfonce plus profondément en terre… La République de 93 était un soldat qui avait besoin de centraliser toutes les forces de la patrie ; la République de 1871 est un travailleur qui a surtout besoin de liberté pour féconder la paix. Paix et travail, voilà notre avenir ! Voilà la certitude de notre revanche et de notre régénération sociale. La Commune s’occupera de ce qui est local, le département de ce qui est régional, le Gouvernement de ce qui est national… Ne dépassons pas cette limite, et le pays et le Gouvernement seront heureux et fiers d’applaudir à cette révolution si grande, si simple… » Naïve illusion d’un vieillard qui avait cependant l’expérience d’une longue vie politique.

L’assemblée se partagea en commissions chargées des différents services : commissions militaire, des