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dans une adresse : « Vous vous souviendrez, quand il le faudra, de la main fraternelle que nous vous avons tendue. » Enthousiaste doux qui voyait la révolution en forme de bucolique.

Le 26, l’isolement s’accentua. Personne ne s’armait contre la commission, mais personne ne s’y ralliait. Presque tous les maires du département refusaient d’afficher ses proclamations. À Arles, une manifestation en faveur du drapeau rouge avait échoué. Les hôtes de la préfecture ne faisaient rien pour expliquer leur drapeau et, dans ce calme plat, devant Marseille curieux, il pendait au campanile, immobile et muet comme une énigme.

La capitale du Sud-Ouest voyait mourir son mouvement. Toulouse avait tressailli au coup du 18 Mars. Là, vibre — au faubourg Saint-Cyprien, — une population ouvrière intelligente et valeureuse. Elle formait le cœur de la garde nationale et, depuis le 19, relevait les postes au cri de : « Vive Paris ! » On alla demander au préfet Duportal, ancien proscrit de 51, de se prononcer pour ou contre Paris. L’Émancipation, qu’il inspirait, faisait campagne contre les ruraux et il avait, dans une réunion publique, accentué la note républicaine. Les clubs le pressèrent, imposant aux officiers de la garde nationale le serment de défendre la République, demandant des cartouches. M. Thiers, voyant que Duportal suivrait fatalement la pente, nomma à sa place Kératry, l’ancien préfet de police du 4 Septembre. Il arriva dans la nuit du 21 au 22, apprit que la garnison était de 600 hommes débandés, que toute la garde nationale se déclarerait pour Duportal ; il battit en retraite sur Agen.

Le 22, la garde nationale préparait une manifestation pour s’emparer de l’arsenal. Duportal et le maire coururent au Capitole, l’hôtel de ville de Toulouse. Le maire déclara que la revue n’aurait pas lieu, Duportal qu’il donnerait sa démission plutôt que de se prononcer. Les généraux, effrayés de l’élan du faubourg, se réfugièrent à l’arsenal. Le maire et la commission municipale s’esquivèrent et Duportal, dans sa préfecture,