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soir, il s’était séparé comme à l’ordinaire, se donnant rendez-vous pour le 18, à onze heures du soir, derrière la Bastille, à l’école de la rue Basfroi, la place de la Corderie très surveillée par la police n’étant plus assez sûre. Depuis le 15 mars, des élections nouvelles lui avaient donné quelques collègues et il avait nommé un comité de défense. À la nouvelle de l’attaque, les uns coururent rue Basfroi, les autres s’occupèrent de lever les bataillons de leurs quartiers. À dix heures, une douzaine de membres se trouvaient réunis, assaillis de demandes, de réclamations, encombrés de prisonniers qu’on leur amenait de toutes parts. Les renseignements précis ne vinrent qu’à deux heures. Varlin s’occupait des Batignolles, Bergeret de Montmartre, Duval du Panthéon ; Pindy dans le IIIe, Faltot rue de Sèvres. Ranvier et Brunel, sans appartenir au Comité, agitaient Belleville et le Xe. On put dresser alors une sorte de plan pour faire converger les bataillons sur l’Hôtel-de-Ville et les membres du Comité Central se dispersèrent dans toutes les directions.

Les bataillons étaient bien debout mais ne marchaient pas. Les quartiers révolutionnaires craignant un retour offensif, ignorant la plénitude de la victoire, se barricadaient à force et demeuraient sur place. Rien ne sortait de Montmartre, immense fourmilière de gardes venant aux nouvelles et de soldats débandés pour lesquels on faisait des quêtes, car ils n’avaient rien pris depuis le matin. Vers trois heures et demie, on vint dire au comité de vigilance établi rue Clignancourt que le général Lecomte était en grand danger. Une foule de soldats entourait le Château-Rouge, exigeait une exécution immédiate. Les membres de ce comité, Ferré, Bergeret, Jaclard, envoyèrent immédiatement l’ordre au commandant du Château-Rouge de veiller sur le prisonnier. Quand cet ordre arriva, Lecomte venait de partir.

Il demandait depuis longtemps à être conduit devant le Comité Central. Les chefs de poste très troublés par les cris, voulant dégager leur responsabilité, ne connaissant que le comité de la rue des Rosiers, avaient décidé d’y conduire le général et ses officiers. Ils arrivent vers quatre heures, à travers une foule terrible-