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Le gouvernement français donna des états provinciaux à la Corse, et continua la magistrature des douze nobles, qui, comme les élus de Bourgogne, administraient le pays. Charles Bonaparte, fort populaire dans l’île, faisait partie de cette magistrature. Il fut attaché en qualité de conseiller au tribunal d’Ajaccio c’était un intermédiaire nécessaire pour arriver au conseil suprême du pays. En 1779, les états le nommèrent député de la noblesse à Paris. Le clergé choisit l’évêque de Nebbio, et le tiers-état un Casabianca. Il mena avec lui ses deux fils Joseph et Napoléon, l’un âgé de onze ans, l’autre de dix ; il mit le premier dans le pensionnat d’Aùtun ; et le second entra comme élève à l’école militaire de Brienne. Napoléon resta six ans à cette école. En 1783, le chevalier de Kergariou maréchal de camp, inspecteur des écoles militaires, le désigna pour passer l’année suivante à l’école militaire de Paris, où l’on envoyait tous les ans, sur le choix de l’inspecteur, les trois meilleurs sujets de chacune des douze écoles de province. Napoléon ne resta que huit mois à Parisi Au mois d’août 1785, il fut examiné par l’académicien Laplace, et reçut un brevet de lieutenant en second d’artillerie au régiment de la Fère ; il était alors âgé de seize ans. Philipeaux, Pecaduc et Démasis étaient du même examen tous les trois émigrèrent au commencement de la révolution le premier a défendu Saint-Jean d’Acre, où il a montré du talent et où il est mort ; le second était Breton et est parvenu au grade de major dans l’armée autrichienne le troisième, rentré en France sous le consulat, a été nommé administrateur du mobilier de la couronne et chambellan.

Le régiment de la Fère se trouvait à Valence en Datiphiné ce fut la première garnison de Napoléon. Quelques troubles s’étant manifestés dans la ville de Lyon, il y fut envoyé avec son bataillon ; depuis ; ce régiment passa à Douai en Flandres, et à Auxobne en Bourgogne. En 1791, Napoléon fut nommé capitaine au régiment d’artillerie de Grenoble, alors en garnison à Valence, où il retourna. Les idées de la révolution commençaient à agiter les esprits. Une partie des officiers émigra. Gouvion, Vanbois, Galbo-Dufour et Napoléon, étaient les quatre capitaines qui, ayant conservé l’opinion des soldats, les maintenaient dans l’ordre.

Napoléon se trouvait en semestre en Corse, en 1792. Il s’empressa d’aller trouver Paoli, dont son père avait été l’ami ; Paoli lui témoigna beaucoup d’amitié et ne négligea rien pour le retenir et l’éloigner des troubles qui menaçaient la mère-patrie.

En janvier et février 1793, il fut chargé d’une contre-attaque sur le nord de la Sardaigne, pendant que l’amiral Truguet opérait contre Cagliari.

L’expédition n’ayant pas réussi, il ramena heureusement ses troupes à Bonifacio. Ce fut son premier fait militaire il lui mérita déjà des marques de l’attachement du soldat et une réputation locale.

Quelques mois après, Paoli, décrété d’accusation par la convention, jeta le masque et s’insurgea. Avant de se déclarer, il fit part de son projet au jeune officier d’artillerie dont il se plaisait souvent à dire « Vous voyez ce jeune homme ; en bien, c’est un homme de l’histoire de Plutarque. » Mais toutes les instances, tout l’ascendant de ce vénérable vieillard, échouèrent