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Du théâtre des opérations.

Le théâtre d’une guerre embrasse toutes les contrées où deux puissances peuvent s’attaquer, soit par leur propre territoire, soit par celui de leurs alliés ou des puissances secondaires qu’elles entraîneront dans le tourbillon par crainte ou par intérêt. Lorsqu’une guerre se complique d’opérations maritimes, alors le théâtre n’en est pas restreint aux frontières d’un État, mais il peut embrasser les deux hémisphères, comme cela est arrivé dans là lutte entre la France et l’Angleterre depuis Louis XIV jusqu’à nos jours.

Ainsi le théâtre général d’une guerre est une chose si vague et si dépendante des incidens, qu’il ne faut pas le confondre avec le théâtre des opérations que chaque armée peut embrasser indépendamment de toute complication.

Le théâtre d’une guerre continentale entre la France et l’Autriche peut embrasser l’Italie seule, ou l’Allemagne et l’Italie, si les princes allemands y prennent part.

Il peut arriver que les opérations soient combinées, ou que chaque armée soit destinée à agir séparément. Dans le premier cas, le théâtre général des opérations ne doit être considéré que comme un même échiquier, sur lequel la stratégie doit faire mouvoir les armées vers le but commun qui aura été arrêté. Dans le second cas, chaque armée aura son théâtre d’opérations particulier, indépendant de l’autre.

Le théâtre d’opérations d’une armée comprend tout le terrain qu’elle chercherait à envahir, et tout celui qu’elle peut avoir à défendre. Si elle doit opérer isolément, ce théâtre forme tout son échiquier, hors duquel elle pourrait bien chercher une issue dans le cas où elle s’y trouverait investie de trois côtés, mais hors duquel il serait imprudent de combiner aucune manœuvre, puisque rien ne serait prévu pour une action commune avec l’armée opérant sur l’autre échiquier. Si, au contraire, les opérations sont concentrées, alors le théâtre des opérations de chaque armée prise isolément, ne devient, en quelque sorte, qu’une des zones d’opérations de l’échiquier général que les masses belligérantes doivent embrasser dans un même but.

Indépendamment des accidens topographiques dont il est parsemé, chaque théâtre ou échiquier, sur lequel on doit opérer avec une ou plusieurs armées, se compose pour les deux partis : 1° D’une base d’opérations fixe ; 2° d’un but objectif principal ; 3° de fronts d’opérations, de fronts stratégiques et de lignes de défense ; 4° de zones et de lignes d’opérations 5° de lignes stratégiques temporaires et de lignes de communications ; 6° d’obstacles naturels ou artificiels à vaincre ou à opposer à l’ennemi ; 7° de points stratégiques géographiques importans à occuper dans l’offensive, ou à couvrir défensivement ; 8° de bases d’opérations accidentelles et intermédiaires entre le but objectif et la base positive ; 9° de points de refuge en cas de revers.

Pour rendre la démonstration plus intelligible, je suppose la France voulant envahir l’Autriche avec deux ou trois armées, destinées à se réunir sous un chef et partant de Mayence, du Haut-Rhin, de la Savoie ou des Alpes maritimes. Chaque contrée, que l’une ou l’autre de ces trois armées aurait à