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site dans les environs faire des parties de chasse, etc. ; c’est à peu près tout ce qui les y occupe : d’application à bien connaître le fort et le faible de leurs places, aucune, on si peu, que ce peu ne les rend pas plus savans. Très rarement se donnent-ils la peine d’examiner le détail de leur garde, de visiter les postes, ni de faire quelque ronde ; et quand je dirais que pas un ne la fait au temps où nous sommes, je ne croirais pas mentir. Il y a plus que cela, c’est qu’ils ne la font ni de jour ni de nuit, dedans ni dehors, ni près ni loin. C’est une inapplication générale à étudier leur fortification, et leur usage, le rapport que les pièces qui la composent ont entre elles en général et en particulier ; les protections qu’elles se peuvent réciproquement donner ; les chicanes dont elles sont capables : le mal qu’elles peuvent faire à l’ennemi, tant qu’elles sont en notre pouvoir, et celui que nous en pouvons recevoir quand nous les avons perdues. Ce sont toutes choses qu’ils devraient savoir parfaitement. Cependant je puis dire que de tous les gouverneurs que j’ai connus, j’en ai fort peu vus qui se soient donné la peine de s’en instruire. Ce qui fait que peu d’entre eux entendent les accessoires de leur défense, l’usage qu’ils pourraient faire de leur fortification, si elle était bien entendue, et jusqu’où se peut porter une bonne défense. Ils ne savent jamais juger sainement du degré de force ou de faiblesse où ils se trouvent pendant les accès du siége. Pas un n’entend le ménagement des munitions, ni de quelle quantité il en a besoin, ce qui fait que tous font des demandes fort extraordinaires, et que quelque quantité qu’ils en puissent avoir, ils en manquent toujours, parce qu’elles sont la plupart dissipées et très mal économisées.

» On peut dire la même chose des armes de rechange, à quoi ils ne font pas grande attention avant que le besoin les presse. Ils savent encore moins le nombre et la quantité de troupes qui leur sont nécessaires ; jusqu’à quel point et comment il les faut ménager dans un siége, pour ne les pas exposer mal à propos : la même chose de l’usage de leur canon. Tous attendent à travailler à leurs retranchemens jusqu’à ce que l’ennemi les presse ; c’est-à-dire, quand il n’est plus temps de le faire, par la quantité de boulets, de bombes et de pierres qui pleuvent de tous côtés sur les pièces attaquées (qui sont celles qu’il faudrait avoir retranchées de bonne heure), ce qui leur cause pour lors un empêchement qu’ils ne sauraient plus surmonter. Rien n’est donc plus commun que de voir des gouverneurs qui, n’entendant point la défense de leurs places, y font des fautes très grossières ; le tout, parce qu’ils ne s’y sont pas préparés, faute de résidence, d’étude et d’application. De là suit nécessairement l’étonnement et l’embarras où ils se trouvent quand ils se voient assiégés, ce qui produit presque toujours une très mauvaise défense ; au lieu que s’ils demeuraient plus assidûment dans leurs places, qu’ils s’appliquassent à les bien connaître, en y employant deux où trois heures de temps par jour ; qu’ils en fissent souvent le tour dehors et dedans ; qu’ils consultassent ceux qui les viennent voir, et qui ont la réputation d’y entendre quelque chose ; qu’ils en fissent des extraits relatifs à un bon plan, ils pourraient, dans une année ou deux de temps, se rendre capables et très savans, Sans cette ap-