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seau, on faisait de distance en distance des batardeaux pour faire amas d’eau durant la nuit, afin qu’au jour il s’en trouvât suffisamment. En d’autres situations et terrains où l’on pouvait faire des puits, on en creusait.

Sans ces attentions, dans les camps où l’on trouve peu d’eau les armées souffrent extrêmement ; à faut une grande police pour empêcher qu’une armée ne dépérisse. Cependant tous nos livres de guerre ne traitent pas cette matière ; mais lisez le premier livre de la Cyropédie, vous y trouverez des leçons sur chaque chose. Ce qui m’a engagé à parler de celle-ci, c’est que bien des auteurs, comme ils n’ont pu être tous habiles dans tous ces différées arts dont ils ont traité, ont été sujets à se tromper en bien des choses, comme fait Hérodote.


De la campagne de 1652. — Moyens dont on se sert M. de Turenne pour empêcher les ennemis, qui lui étaient supérieurs, de prendre des quartiers d’hiver en France.

L’armée ennemie était auprès de Laon, d’où elle partit en grande diligence pour aller assiéger Rethel, qu’elle prit. Toutes les armées ennemies, jointes ensemble, montaient bien vingt-cinq mille hommes. Celle du roi ne passait pas dix mille.

Je ferai observer ici qu’il doit paraître surprenant que M. de Turenne dise d’avance au roi, en partant de Paris, qu’il espérait empêcher les ennemis de prendre des quartiers d’hiver en France, malgré la grande supériorité des ennemis. Ceux qui liront ce que je vais rapporter verront bien qu’en effet il exécute ce qu’il a promis ; mais après l’avoir lu, on ne pourra, sans une attention particulière, comprendre comment M. de Turenne pouvait avancer une pareille proposition, rien alors ne paraissant moins certain. Cependant comme je juge sur quoi il a pu la fonder, je le ferai remarquera la fin de ceci.

« L’armée du roi marcha de Senlis vers la Marne, et approcha de Châlons. On apprit que les ennemis avaient assiégé Sainte-Mehehould, dans lequel il y avait peu de monde, mais qui fit une bonne défense. Quand on en sut la prise, l’armée du roi était auprès de Vitry, et n’osait s’approcher de celle des ennemis, qui, de Sainte-Menehould, marchait à Bar-le-Duc, où il fallait, pour assiéger la ville et le château, qu’une armée se séparât. M. de Turenne marcha à Saint-Dizier pour la secourir ; mais il apprit que la basse ville ayant été prise, le château s’était rendu en vingt-quatre heures.

M. de Turenne, ayant appris la prise de Bar, et en même temps que l’armée d’Espagne n’était plus avec M. le Prince, résolut de s’approcher de lui, et de le combattre au premier lieu où il en trouverait l’occasion ainsi il marcha à Vaucouleurs, afin de se trouver du même côté de la rivière de Meuse que M. le Prince, qui, après avoir pris le château de Void, s’approcha de Toul. Il y avait quelques jours que M. d’Elbeuf, avec deux mille hommes, avait joint l’armée du roi. De Vaucouleurs elle marcha vers Void, d’où elle délogea la nuit poursuivre M. le Prince, qui s’était retiré à Commercy, dont il s’était saisi, et où il y avait deux châteaux ; mais ayant su que l’armée du roi le suivait, il se retira à Saint-Mihiel, grande ville dont les murailles étaient à demi démolies. Comme on ne lui donna pas le temps de s’y retrancher, il fut obligé de se retirer