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nissent journellement le pain et les autres subsistances nécessaires ; celle qui était supérieure allait manger le pays de son ennemi, et celle qui était inférieure vivait aux dépens de celui qu’elle défendait.

M. de Turenne a écrit trois sortes de guerres la première une guerre civile dans l’empire, occasionnée par la religion. L’empereur et le duc de Bavière étaient à la tête du parti catholique les protestans étaient soutenus par la France conjointement avec la Suède. La France était précédemment en guerre avec la maison d’Autriche ; ainsi, dans cette guerre civile, la France n’était d’auxiliaire. M. de Turenne en commence le récit seulement de l’année 1643, qu’il fut fait maréchal de France, et qu’il eut en chef le commandement de l’armée d’Allemagne, et il finit en 1648, à la paix de Munster. La seconde guerre est la guerre civile qui commença en France aussitôt après la paix de Munster, et la troisième est une guerre en Flandre, de frontière à frontière, entre la France et l’Espagne laquelle fut conduite par M. de Turenne jusqu’à la paix des Pyrénées.

Nous voyons, dans les deux guerres civiles, de très-petites armées, qui n’avaient pas de solde réglée, souvent se mutiner faute de paye, et subsister de ce quelles pouvaient prendre. Les villes qui n’étaient pas assez fortes pour se défendre ouvraient leurs portes au plus fort qui se présentait, et qui les rançonnait en argent, en vivres, pain et autres munitions, qu’elles étaient contraintes de voiturer à son camp, tant qu’il restait à leur portée ; mais quand il s’éloignait, si les blés sur terre étaient mûrs, il les coupait ou les prenait dans les granges, les envoyait moudre dans les moulins aux environs du camp, ensuite le pain se cuisait dans les fours des villages les plus proches. Pour cette façon de vivre, la cavalerie trouvait plus de facilité que l’infanterie, en ce que chaque cavalier portait avec lui sur son cheval des vivres pour quelque temps ; provision que ne peut faire le soldat qui, étant à pied, a encore ses armes et ses hardes à porter.

Non-seulement la cavalerie avait cet avantage sur l’infanterie, mais comme les armées étaient souvent éloignées des villes de leur parti, si un soldat était malade, blessé, enfin hors d’état de marcher, non-seulement on n’avait pas de lieu où le faire soigner, on ne savait même où le laisser en sûreté. De plus, dans toutes les batailles ou combats que l’on perdait, l’infanterie était toujours abandonnée à l’ennemi, et à la merci des paysans, au lieu que la cavalerie, a peu de cavaliers près, trouvait toujours à se retirer. Vous en voyez un exemple dans ce que dit M. de Turenne, que le maréchal de Guébriant ayant été tué au siège de Roteville, M. de Rantzauprit le commandement de l’armée, qui marcha à Dütlingen, où il fut battu que sa cavalerie se sauva sur le Rhin ; que l’infanterie, qui était dans Rotevitle, se rendit à discrétion, et que celle de son armée fut entièrement détruite. Suivez les combats de Fribourg, vous y verrez encore combien l’infanterie perdit en comparaison de la cavalerie. À Mariendal, l’infanterie fut mise entièrement en déroute ; à Nordlingen à peu près de même. Aussi est-ce pour ces raisons que vous y voyez souvent les armées plus nombreuses en cavalerie qu’en infanterie, au lieu que dans les autres guerres, communément on trouve deux tiers d’infanterie contre un tiers de cavalerie.