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l’autre de s’éloigner de la rivière, afin de jeter son pont, et que ses ouvriers puissent y travailler. Quelque parti que prenne celui qui est supérieur en nombre, si l’autre est plus prompt à charger ses armes, s’il sait mieux tirer, et qu’il y joigne encore plus de fermeté, il pourra se rendre le maître des deux bords.

Non-seulement, en, de semblables lieux, les actions ne peuvent se passer qu’à coups de feu, mais dans tous les postes que l’on défend, où celui qui attaque souvent ne peut aller à l’autre que par un petit front ; ainsi il faut qu’il lui fasse quitter son poste par la supériorité de son feu ; et quand il aura réussi, pour lors il peut chercher à en venir aux coups de main.

Mais comme vous avez un ennemi devant vous qui vous contrarie, et qui est toujours opposé à vous laisser faire ce qui pourrait vous être profitable, si, de son côté, il se croit supérieur à vous combattre avec les armes à feu, il cherchera les moyens d’éviter les combats en plaine ; et si vous voulez l’attaquer, vous serez souvent contraint de le faire dans des postes, à l’effet de quoi il s’étudiera à profiter de la situation des lieux, ou s’en procurera les avantages par le travail, et pour lors il en faut revenir aux coups de feu, avant d’en pouvoir venir aux coups de main. Aussi l’arme à feu est celle qui détruit le plus l’homme, et surtout aujourd’hui. Pour en. être bien persuadé, il n’y a qu’à aller aux hôpitaux, vous verrez combien peu il s’en trouve de blessés par les armes blanches, en comparaison du nombre qui le sera par les armes à feu. Ma proposition n’est pas avancée légèrement, mais avec connaissance.

On me répondra : les soldats sont armés de fusils, les officiers et sergens sont armés d’espontons et de hallebardes. Il est nécessaire, pour voir la justesse des mouvemens des soldats, de les séparer et de les en éloigner.

C’est un inconvénient ; pour qu’il n’arrive plus, et que les officiers puissent eux-mêmes faire l’exercice, tirer et faire toutes les motions militaires avec leurs soldats, il n’y a qu’à se conformer à la proposition que je viens de faire, d’armer les officiers et les sergens de fusils comme les soldats.

On copiera par là le vrai des combats, et de tous les mouvemens que l’on sera obligé de faire avant de combattre ou en combattant. Il n’y aura plus de décharge faite mal à propos de la part des soldats, comme cela est arrivé souvent, puisque ce seront les officiers qui conduiront toutes les actions et les mouvemens ; au lieu que jusqu’à présent, étant armés différemment et placés en dehors du bataillon, cela a toujours été cause de bien des fautes.

Les fusils que les officiers porteront seront du même calibre que ceux des soldats, mais plus fins et plus légers.

Vous ne remédierez à tous les inconvéniens que quand vous mêlerez les officiers avec les soldats, et quand ce seront eux qui dirigeront leurs compagnies, et que le soldat sera habitué à ne rien faire de son chef, mais à se conformer à ce que ses officiers lui ordonneront et pour cela, je le répète, il faut que tous les officiers soient dans les rangs des soldats dès que le bataillon est en bataille, soit qu’il s’agisse de faire des quarts de conversion et autres mouvemens, soit qu’on le fasse tirer ou faire l’exercice.