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des places, maritimes les unes après les autres, et de proche en proche, comme elles sont situées.

Livre I… « Ainsi l’armée navale des Perses (continue Arrien) se retira de Milet sans rien faire ; le prince, la voyant partir, résolut de rompre la sienne, parce qu’elle lui était d’une grande dépense et qu’il avait besoin d’argent, outre qu’elle était plus faible que celle des ennemis, et qu’il ne voûtait pas exposer une partie de ses forces à un périt évident ; d’ailleurs il n’en avait plus besoin, étant maître de l’Asie, et par la prise des villes maritimes croyait dissiper celle des Perses, qui n’avait plus de retraite ni de quoi remplir sa, chiourme. »

Vous voyez ensuite qu’Alexandre suit toujours le but qu’il s’est proposé, en faisant la conquête de la Lycie et de la Pamphilie afin d’assujettir toute la côte. L’hiver étant déjà fort avancé, il entra dans la Miliade, qui a été annexée à la Lycie, et ordonna aux provinces qui se soumettaient de recevoir les gouverneurs qu’il leur envoyait, à quoi elles obéirent. Alexandre arrive à Tarse, et peu de temps après se donne la bataille d’Issus, où il défait entièrement l’armée de Darius ; mais au lieu de le poursuivre, il ne se dérange pas de son projet en la moindre chose, et continue de prendre les villes maritimes, parce qu’il connaît que c’est le seul moyen d’assurer toutes les conquêtes qu’il a prémédité de faire ; en conséquence il assiège Tyr. C’est par le discours qu’il tient à ses capitaines que je découvre toute la profondeur de son projet, comme je l’ai déjà dit.


Conseils aux officiers généraux.

Je sais combien, entre nous, les opinions sont différentes sur les distances que l’on doit donner entre les bataillons et escadrons ; les uns veulent qu’entre deux bataillons et deux escadrons il y ait un vide de la même étendue du front du bataillon et de l’escadron, ce qu’on appelle se mettre en bataille tant plein que vide ; d’autres ne veulent que la moitié de cette distance, d’autres un tiers, d’autres un quart, et d’autres aucune, de sorte qu’il faut que les bataillons et escadrons se touchent.

Comme il n’y a rien de réglé, toutes les fois que des armées se mettent en bataille dans des plaines, soit qu’elles marchent de front à l’ennemi, ou qu’elles le côtoyent en s’allongeant par les flancs, ou de toute autre manière, il arrive que les uns font serrer les bataillons et escadrons, les autres les font arrêter pour leur faire laisser de grandes distances en sorte que l’on voit des troupes aller en avant, puis revenir en arrière, ce qui fait que l’ordre de bataille ne se forme pas. L’ennemi, qui a le plus tôt formé le sien, profite de l’occasion, marche sur vous, et vous trouvant en désordre, vous renverse. C’est ce qui a donné lieu de tout temps au proverbe qui dit que l’on perd bien des batailles pour ne pas savoir se mettre en bataille. Si, dans le temps que les armées étaient moins nombreuses. c’était une vérité reconnue, combien aujourd’hui n’est-elle pas confirmée par les fâcheuses expériences que nous en avons faites avec nos grandes armées ?

Ainsi, jugeant combien il est dangereux, messieurs, de vous laisser tous agir différemment sur un point aussi important, mon intention est que vous