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Tissaphernes, et parmi eux Phalin, qui était Grec, et faisait profession de savoir fort bien l’art militaire, ce qui l’avait mis en crédit parmi les barbares. »

Livre II, section 4. Dans l’éloge que fait Xénophon des colonels que Tissaphernes avait fait assassiner, parlant de Proxènes, il dit : « Proxènes était de Bœtie ; dès sa jeunesse, il aspira aux grandes choses ; il tâcha de s’en rendre capable. Il donna de l’argent à Gorgias le Léontin pour l’instruire ; et lorsqu’il se vit en état de commander et de faire du bien à ses amis, aussi bien que d’en recevoir, il se mit au service de Cyrus, et le suivit dans son entreprise, sous l’espérance de rapporter beaucoup d’honneur et de profit. Il est marqué ensuite qu’il mourut à l’âge de trente ans, ou environ. »

Ces endroits de Xénophon sont des preuves que l’art de la guerre s’enseignait chez les Grecs par principes et par règles ; mais nous ne pouvons juger de là quelles étaient les parties de cet art que l’on y montrait, ou si elles y étaient généralement enseignées, quoique le terme de commander embrasse bien des parties et surtout les grandes.

Xénophon, dans sa Cyropédie, débite toute la tactique des Grecs ; et tout ce qu’il savait en matière de guerre. Il fait parler Cambyse pour en instruire Cyrus, et fait faire la guerre à Cyrus en conformité.

Il importe fort peu à ceux qui veulent apprendre la guerre que les faits rapportés soient véritablement arrivés, pourvu qu’ils soient placés de manière à pouvoir instruire, et que les principes s’y trouvent également renfermés. Je ne rapporte ici de la Cyropédie que ce qui peut regarder les parties de l’art militaire qui s’enseignaient chez les Grecs.

Que l’on lise bien la Cyropédie ; que l’on fasse des extraits des endroits dignes de remarque, on trouvera que tous les préceptes dont Cambyse fait mention, et dont il ne nomme encore que les titres, que ces préceptes, dis-je, y sont renfermés en substance ; on verra qu’illes met tous en pratique, et qu’il nous apprend à les y mettre nous-mêmes, et à en faire usage dans de pareilles occasions.

Je ferai remarquer que cette idée de Xénophon d’imaginer une guerre et de la décrire, dans la vue de mieux faire comprendre ce qu’il veut enseigner, est un très-bon moyen pour y parvenir, d’autant plus que dans une telle description, où tout est supposé, imaginé, et placé à propos pour instruire, les opérations y sont plus faciles à comprendre en ÿ joignant la disposition pour l’exécution, que si d’ailleurs on voulait les expliquer en détail par des règles.

On convient bien, m’objectera-t-on, qu’un homme qui aura été à la guerre pourra profiter des préceptes que Xénophon donc dans sa Cyropédie ; mais on aura peine à comprendre comment un homme pourra apprendre à un autre à ranger des troupes en bataille, et à les faire mouvoir suivant les règles dé la guerre, sans en avoir à sa disposition pour’les mettre en ordre ; car Gorgias, qui était un homme de science, et qui peut-être n’a jamais été à la guerre, n’avait point de corps de troupes, ni petit ni grand, dont il pût disposer pour pouvoir démontrer leurs différens mouvemens. Je répondrai qu’il est vrai que Gorgias n’avait point de troupes à sa disposition pour servir à la démonstration de ses leçons, et que c’est par cette raison que nous devons