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truire une opinion vulgaire, qui est de croire que, depuis l’usage des armes à feu, la guerre se fait d’une façon bien différente de celle qui était en pratique auparavant, et qu’ainsi tout ce qu’on peut lire sur la guerre chez les anciens n’est plus en usage. Je dirai à ce sujet que la science et l’art de la guerre ont été et seront toujours les mêmes ; qu’ils ne varient pas, de quelques armes qu’on se serve ; que les capitaines qui ont été à la tête des armées, et qui ont sa guerre par principes, de tous les temps ont été obligés de former leurs ordres de bataille suivant les différentes situations des lieux où ils devaient combattre, et suivant l’usage qu’ils pouvaient faire de leurs armes. Nos ordres de bataille, pour combattre aujourd’hui, doivent être formés sur les mêmes principes.


Observations sur les auteurs grecs et romains. —Remarques et réflexions sur l’Iliade[1].

Tome I, livre IV, page 288. « On voyait s’avancer les nombreuses phalanges des Grecs qui marchaient au combat. Elles avaient à leur tête chacune leurs chefs, qu’elles suivaient avec crainte dans un profond silence, pour entendre et exécuter leurs ordres plus promptement… Au contraire, les Troyens étaient dans leur camp semblables à des troupeaux de brebis qui sont répandus dans des parcs… et font retentir de leurs bêlemens tout le pâturage. Tel est le bruit confus des troupes innombrables dont l’armée des Troyens est composée. »

Il n’est pas possible de faire mieux connaître la différence qu’il y a entre de vieilles troupes aguerries, bien disciplinées, et des troupes de nouvelle levée, que par la comparaison que fait Homère des phalanges grecques avec les troupes des Troyens ; et rien en effet ne mérite mieux d’être observé que le silence que gardent les Grecs en allant au combat, pour mieux entendre les ordres qu’on leur donne. Cette discipline se trouve aujourd’hui dans les bonnes troupes.

Livre V, page 367. Le grand Atride… ranimant les soldats : « Mes amis, leur disait-il, montrez-vous des hommes ; armez-vous d’un courage intrépide, et que le respect que vous vous devez les uns aux autres dans la sanglante mêlée vous oblige à faire votre devoir. Dans une armée de vaillans hommes, il s’en sauve toujours plus qu’il n’en périt, au lieu que les lâches, non-seulement n’acquièrent pas de gloire, mais encore leur lâcheté leur ôtant la force, ils deviennent la proie de leur ennemi. »

Rien n’est si vrai qu’en combattant vaillamment et en bon ordre, on perd beaucoup moins de monde, et que la perte des hommes est bien plus grande dans les déroutes. Il est encore vrai que les officiers et les soldats d’une même compagnie, et qui se connaissent tous, ont entre eux une véritable émulation, et que la crainte qu’il ne leur soit reproché quelque chose par leurs camarades, les engage à faire leur devoir.

Tome II, livre VII. Nestor, parlant au fils d’Atrée… « Ensuite, dit-il, nous enfermerons notre camp d’une muraille flanquée de tours fort élevées, pour servir de rempart à nos vaisseaux et à nos troupes. On y fera d’espace en espace de bonnes portse assez larges pour faire passer nos chars, et nous l’environnerons d’un fossé large et profond que les hom-

  1. Traduction de madame Dacier.