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POLYBE, LIV. XXXI.

nuit, ces jeunes gens viendraient s’embarquer. Ce changement ne fit nulle peine au capitaine. Il lui était fort indifférent de recevoir tel ou tel sur son bord, dès que le payement qu’il recevait était égal. En effet, le prince et sa troupe, au nombre de seize personnes, en comptant les pages et les valets, arrivèrent à Ostie sur les trois heures du matin. Ménylle conversa quelque temps avec eux, leur montra les provisions qu’il avait faites, les recommanda vivement au capitaine, et ils s’embarquèrent. Au-point du jour le pilote leva l’ancre ; tout se fit à l’ordinaire dans le vaisseau, sans qu’il pensât avoir sur son bord d’autres personnes que quelques officiers que Ménylle envoyait à Ptolémée. Le lendemain à Rome on ne s’avisa point de s’informer où était Démétrius, ni ceux qui en étaient sortis avec lui. On les croyait à Circée, où se trouvèrent aussi ceux qui y avaient été envoyés, pensant les y rencontrer. On n’apprit la fuite du prince que par un page qui, fouetté à Anagnia courut à Circée pour s’en plaindre à son maître, et qui ne l’y trouvant pas, ni sur le chemin de Circée à Rome, le dit dans cette ville aux amis du prince et à ceux qui étaient restés dans sa maison. On ne commença à soupçonner qu’il s’était évadé que quatre jours après son départ. Au cinquième les sénateurs s’assemblèrent pour délibérer sur cette affaire, mais alors le vaisseau qui portait le prince avait six jours d’avance, et il avait doublé le détroit de Sicile. Il était trop éloigné, et il voguait trop heureusement pour que l’on pût espérer de l’atteindre ; et quand on aurait voulu le poursuivre, on n’était pas maître d’arrêter Démétrius. Ainsi, quelques jours après, l’on prit le parti de députer Tibérius Gracchus, Lucius Lentulus et Servilius Glaucias, avec ordre d’examiner de près l’état de la Grèce, de passer de là en Asie pour y observer Démétrius, y étudier les dispositions des autres princes, et accommoder les différends qu’ils avaient avec les Gallo-Grecs.

Tibérius eut ordre de veiller en personne sur toutes ces affaires. (Ambassades.) Dom Thuillier.


Caton, ainsi que le rapporte Polybe dans le xxxie livre de son Histoire, se plaignait avec indignation que quelques personnes eussent introduit dans Rome un genre de corruption venu de l’étranger, à tel point qu’un bel adolescent se vendait plus cher qu’un champ fertile. (Athenæi lib. vi, c. 21.) Schweigh.


Le plus jeune des Ptolémées tâche de se soumettre l’île de Chypre et la Cyrénaïque.


Ce prince, arrivé dans la Grèce avec les députés romains, y éleva un grand nombre de soldats mercenaires, et avec eux un certain Macédonien, nommé Damasippe, qui, après avoir fait égorger tous les membres du conseil public de Phacon, avait été obligé de sortir de la Macédoine avec sa femme et ses enfans. De là Ptolémée fut dans la Pérée, petit canton sur la côte de Rhodes et vis-à-vis de cette île. De la Pérée, où il avait été bien reçu, il se proposa de passer en Chypre. Mais Torquatus et ses collègues, le voyant rassembler beaucoup de troupes étrangères, le firent souvenir que le sénat avait ordonné qu’on le reconduisît sans guerre dans son royaume, et lui persuadèrent de congédier ses troupes dès qu’il serait arrivé à Sida, de quitter le dessein d’entrer dans l’île de Chypre, et de faire en sorte qu’ils pussent se joindre sur les frontières de la Cyré-