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POLYBE, LIV. XXXI.

appela les Cnidiens à son secours. Ils vinrent et arrêtèrent pendant quelque temps les assiégeans ; mais les habitans de Calyndas, craignant pour l’avenir, députèrent à Rhodes, et promirent de se livrer eux et leur ville, si l’on voulait les secourir. Les Rhodiens viennent par terre et par mer, font lever le siége et prennent possession de la ville. Le sénat romain leur permit de jouir tranquillement de leur nouvelle conquête. (Ambassades.) Dom Thuillier.


IV.


Ptolémée vient à Rome pour demander à être rétabli dans le royaume de Chypre. — Réflexion de l’historien sur la politique des Romains.


Quand les Ptolémées eurent fait entre eux le partage du royaume, le plus jeune des deux rois, mécontent de la portion qui lui était échue, en porta ses plaintes au sénat. Il demanda que le traité de partage fût cassé, et qu’on le remît en possession de l’île de Chypre ; il alléguait pour raison, qu’il avait été forcé par la nécessité des temps à consentir aux propositions de son frère, et que, quand on lui accorderait Chypre, sa part n’égalerait pas encore à beaucoup près celle de son aîné. Canuléius et Quintus, envoyés de Rome pour pacifier les différends des deux frères, s’élevèrent contre cette prétention. Ils rendirent témoignage à la vérité que soutenait Ménithylle, député à Rome par l’aîné, que le plus jeune leur était redevable non-seulement de la Cyrénaïque, sur laquelle il avait été établi roi, mais encore de la vie ; que, detesté du peuple, il s’était cru trop heureux de régner sur cette région ; que le traité avait été ratifié en présence des autels, et que de part et d’autre on avait juré de se tenir parole. Ptolémée contesta tous ces faits, et le sénat voyant qu’en effet le partage n’était point égal, profita habilement de la querelle des deux frères pour diminuer les forces du royaume d’Égypte en les divisant, et accorda au plus jeune ce qu’il demandait ; car telle est la politique ordinaire des Romains : ils mettent à profit les fautes d’autrui pour étendre et affermir leur domination, et se conduisent à l’égard de ceux qui commettent ces fautes, de façon que, quoiqu’ils n’agissent que pour leur intérêt, on leur a encore obligation. Comme donc la grande puissance de l’Égyple leur faisait craindre qu’elle ne devînt trop formidable, si elle tombait entre les mains d’un souverain qui en sût faire usage, ils firent partir avec Ptolémée deux députés, Titus Torquatus et Cn. Mérula, pour mettre ce prince en possession de l’île, et établir une paix durable entre les deux frères rivaux.


Démétrius Soter s’évade de Rome et retourne en Syrie pour y régner.


À peine eut-on appris à Rome l’assassinat commis sur la personne d’Octavius, qu’il y arriva des ambassadeurs envoyés par Lysias de la part d’Antiochus, pour faire voir que les amis du prince n’avaient aucune part à la mort du député. Le sénat renvoya ces ambassadeurs sans leur répondre et sans rien dire de ce qu’il pensait de ce meurtre. Démétrius, frappé de cette nouvelle, fit sur-le-champ appeler Polybe, et, incertain lui-même de ce qu’il devait faire en cette occasion, lui demanda s’il était à propos qu’il eût encore une fois recours au sénat pour avoir la permission de retourner en Syrie. « Gardez-vous bien, lui répondit Polybe, de heurter contre une pierre qui vous a déjà fait faire un faux pas. N’espérez rien que