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POLYBE, LIV. XXX.

Polybe dans son livre xxx, dans les jeux qu’il donna à l’occasion de son triomphe. Il avait fait venir de Grèce de très-habiles ouvriers et avait fait construire dans le cirque un très-vaste théâtre. Il y fit paraître d’abord tous les joueurs de flûte, Théodore le Béotien, Théopompe, Hérénippe et Lysimaque, qui étaient alors ce qu’il y avait de plus célèbre en ce genre dans toute là Grèce, et il leur donna ordre de s’avancer sur l’avant-scène avec le chœur et de jouer tous à la fois. Ceux-ci ayant commencé par une mesure d’un mouvement très-vif et très-mélodieux, Anicius leur envoya dire que ce chant ne lui convenait pas, et qu’ils eussent à lutter. Les joueurs de flûte, à ce mot, restèrent dans une fort grande indécision sur le sens que voulait lui donner Anicius ; mais à ce moment arriva un licteur de la part d’Anicius, qui leur signifia d’avoir à se tourner les uns vis-à-vis des autres, et à engager une espèce de lutte. Dès qu’ils eurent bien compris ce qu’Anicius voulait, y trouvant eux-mêmes un moyen de s’abandonner à la licence, ils mirent tout dans la plus grande confusion, et jouant de la flûte de la manière la plus discordante et la plus folle, ils se tournèrent contre les chœurs qui les séparaient et contre ceux des joueurs de flûte qui leur étaient opposés. Les chœurs, de leur côté, faisant le plus grand bruit et parcourant tout le théâtre, se précipitèrent sur ceux qui leur étaient opposés et se retiraient comme pour prendre la fuite. À ce moment, je ne sais quel homme du chœur, retroussant son habit, porta ses mains sur un joueur de flûte comme pour le provoquer au pugilat, et il y fut excité par les bruyans applaudissemens et les cris des spectateurs. Au moment où tous ces gens se battaient entre eux, voilà que tout à coup deux sauteurs s’avancent dans l’orchestre avec la symphonie. En même temps quatre pugilistes se présentent avec leurs propres joueurs de flûte ou de trompette. Comme tous ces gens se mêlaient à qui mieux mieux, on ne peut dire en effet quel fut le spectacle. Quant aux tragédies, ajoute Polybe, si j’entreprenais d’en parler, je craindrais bien de paraître à quelques personnes faire une plaisanterie. (Apud Athenæum, lib. xiv, c. 1.) Schweighæuser.


II.


Les Étoliens et les Épirotes.


Les Étoliens étaient accoutumée à vivre de vol et de brigandage. Tant qu’il leur fut permis de piller les Grecs, ils ne vécurent qu’à leurs dépens ; toute terre leur fut ennemie. Quand les Romains furent les maîtres, ne pouvant chercher de secours hors de leur pays, ils tournèrent leur fureur contre eux-mêmes. Dans une guerre civile qui s’éleva parmi eux, il n’y eut pas de violences et de cruautés qu’ils n’exerçassent. Après s’être égorgés les uns les autres, peu de temps auparavant, proche d’Arsinoé, rien ne pouvait plus les arrêter. Leur rage était parvenue à un tel excès, qu’il n’y avait ni chef ni conseil qui pût lu réprimer. On ne voyait dans toute l’Étolie que confusion, qu’injustices, que meurtres. Rien ne s’y faisait d’après les lumières du bon sens et de la raison : une mer agitée par une grande tempête n’est pas plus violemment troublée que ne l’était alors la république des Étoliens.

L’Épire n’était pas plus tranquille. Parmi la multitude on voyait le plus de modération ; mais, en récompense, le chef était un monstre d’impiété et d’injustice. Je ne crois pas qu’il y ait eu jamais et que jamais il doive naître