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POLYBE, LIV. XX.

le bruit des mauvais traitement qu’avaient reçus les ambassadeurs avait prévenu les lettres, et toute la multitude en avait été indignée au point que personne ne voulut se trouver à l’assemblée, et qu’il fut par conséquent impossible de délibérer. Une autre chose encore ralentit les négociations. Dans ce temps-là, Nicandre arriva d’Asie à Phalère, dans le golfe de Malée, d’où il était parti, et dès qu’il eut fait connaître au peuple la bonne volonté qu’Antiochus avait pour lui et les promesses dont il était chargé de la part de ce prince, c’en fut assez ; on ne pensa plus à la paix, et on laissa tranquillement passer les dix jours de trève sans rien conclure pour finir la guerre.

Il arriva à ce Nicandre, en revenant, une aventure singulière que je ne puis passer sous silence. Il y avait douze jours qu’il avait fait voile d’Éphèse lorsqu’il entra dans le port de Phalara. Sur la route, ayant découvert que les Romains étaient à Héraclée, et que les Macédoniens, quoique hors de Lamia, campaient cependant assez près de cette ville, il fut assez heureux pour porter, sans être aperçu, tout ce qu’il avait d’argent dans Lamia. La nuit venue, il voulut passer entre les deux champs pour gagner Hypate, mais il tomba dans le quartier d’une élite de Macédoniens qui le saisirent et le menèrent à Philippe, qui était alors à table. Il semblait ne pouvoir éviter un de ces maux, ou d’essuyer toute la colère du roi de Macédoine, ou d’être livré aux Romains. On annonce Nicandre à Philippe, qui commande qu’on ait soin de lui et qu’on ne le laisse manquer de rien. Au sortir du repas, il rejoint Nicandre, et, après s’être plaint que les Étoliens eussent été assez insensés pour donner entrée dans la Grèce aux Romains et ensuite à Antiochus, il l’exhorta à avertir les magistrats, au moins dans les circonstances présentes, d’oublier le passé, de rechercher son amitié, et de faire en sorte qu’eux et les Macédoniens ne travaillassent pas à se détruire réciproquement les uns les autres. À l’égard de Nicandre, il lui recommanda de n’oublier jamais la bonté qu’il avait pour lui ; il le renvoya avec bonne garde, et ordonna à ceux qui le conduisaient de ne le pas quitter qu’il ne fût entré dans Hypate. Cela fut ponctuellement exécuté. Nicandre revint sain et sauf dans sa patrie, non sans être extrêmement surpris du bonheur extraordinaire qu’il avait eu dans cette occasion. Depuis ce temps-là, il garda toujours une forte inclination pour la maison de Macédoine. Sa reconnaissance lui coûta cher du temps de Persée ; car, comme il ne s’opposait qu’à contre-cœur aux entreprises de ce prince, il fut soupçonné et accusé d’avoir avec lui des intelligences. Il fut appelé à Rome pour y rendre compte de sa conduite, et il y mourut. (Ambassades.) Dom Thuillier.


Corax est une montagne entre Callipoli et Naupacte.

Aperantia est une ville de Thessalie. (Steph. Biz.) Schweigh.


VII.


Ambassade des Lacédémoniens auprès du sénat romain.


Les ambassadeurs envoyés à Rome par les Lacédémoniens arrivèrent alors, sans y avoir rien obtenu de ce qu’ils espéraient. Il s’agissait des ôtages et de leurs bourgs. Sur le dernier point, le sénat répondit qu’il donnerait ses ordres aux députés qui devaient aller dans la Laconie, et à l’égard des ôtages,