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deur[1]. Ce corps de huit à neuf mille hommes composait un mora lacédémonien, et était divisé en quatre grandes sections nommées lochos. Nous avons vu que le lochos se subdivisait lui-même en plusieurs pentécostys, et que le pentécostys formait ensuite des énomoties. Cette phalange montrait un front très petit. Le reste de l’infanterie, troupes étrangères, à la solde de la république, ne présentait presque que des armés à la légère.

À une distance plus grande que d’ordinaire, et en avant de la ligne, Xanthippe plaça sur un seul rang tous ses éléphans côte à côte, et les serra le plus qu’il était possible, pour qu’ils ne débordassent pas son infanterie. Il étendit d’ailleurs sa ligne en composant une cinquième section qui lui fut fournie par les soldats les plus pesamment armés, pris dans les autres troupes.

Sa cavalerie, dans laquelle il mettait sa principale confiance, forma ses ailes ; mais il la posta fort en avant du front de son infanterie, de sorte qu’elle fût presque sur la même ligne que ses éléphans. Enfin, il partagea les armés à la légère entre la cavalerie des deux ailes, et les plaça derrière les escadrons.

Xanthippe avait saisi de suite le fort et le faible des éléphans dans un jour de bataille ; il comprit que ces animaux devaient agir indépendamment des troupes, et il les regardait surtout comme une espèce de barrière contre le choc de l’infanterie romaine qu’il redoutait avant tout.

Les éléphans étaient en grand nombre, et Xanthippe ne dut pas s’inquiéter beaucoup de la manœuvre des vélites qui avaient coutume de les faire rebrousser ou de les mettre à dos de l’armée en les entraînant dans les intervalles des manipules. À la distance où ces animaux se trouvaient de la ligne carthaginoise, on pouvait encore les rallier, leur préparer des passages, si on ne parvenait pas à les faire revenir de leur première, épouvante, et Xanthippe ne supposait pas qu’ils parvinssent à traverser les légions sans y causer de désordre.

L’infanterie romaine avait tant de supériorité sur celle de Carthage, que si elle eût percé à travers les éléphans, sans être entamée, elle aurait bientôt culbuté et mis en déroute toute la phalange. Aussi le Lacédémonien donna-t-il ordre à sa cavalerie, forte de cinq mille hommes, d’examiner le mouvement des vélites, de charger aussitôt les cinq cents cavaliers romains dont la résistance ne pouvait être longue, de les abandonner à la vitesse de leur monture, et de tourner court sur les légions.

Les Romains, accoutumés à vaincre les Carthaginois, ne demandaient qu’à joindre ces ennemis tant de fois battus. Dans cette occasion, ils marchèrent avec une ardeur et une confiance merveilleuses. Ce que Régulas aperçut de nouveau dans l’ordonnance carthaginoise, lui donna l’idée de changer la sienne ; les éléphans surtout, qu’il n’avait pas encore vus en si grand nombre, lui inspirèrent quelque crainte, et ce fut principalement contre eux qu’il dirigea ses précautions.

L’armée que commandait Régulus composait une armée consulaire forte de deux légions romaines, et de deux alliées. À cette époque, ces légions, lorsqu’elles étaient au complet, présentaient chacune quatre mille deux cents hommes, c’est-à-dire, pour les quatre, seize mille huit cents combattans. C’est à peu près là, en effet, le chiffre que Polybe nous donne pour l’infanterie de Régulus. Sa cavalerie n’était pas, à

  1. Voy. l’Atlas.

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