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POLYBE, LIV. VIII.

et ce qui peut passer pour un prodige, pour soumettre enfin à un seul empire et à une seule puissance toutes les parties connues de l’univers ? On peut bien apprendre par des histoires particulières comment les Romains ont pris Syracuse, comment ils ont soumis l’Espagne à leur domination ; mais, sans une histoire générale, il est difficile de comprendre comment ils ont soumis toute la terre, quels obstacles particuliers ils ont rencontrés dans le vaste dessein de conquérir le monde entier, et quels sont les événemens et les circonstances qui ont secondé leurs efforts. On ne peut donc non plus, sans cette histoire générale, bien concevoir la grandeur des actions, ni les forces d’un gouvernement ; car, que les Romains se soient mis en marche pour subjuguer l’Espagne ou la Sicile, qu’ils aient fait la guerre sur terre et sur mer, ces entreprises, à ne les regarder qu’en elles-mêmes, ne sont pas fort extraordinaires ; mais quand on considère que toutes ces entreprises et beaucoup d’autres s’exécutaient en même temps par la même puissance et le même gouvernement, et qu’on joint à cela les malheurs et les guerres dont l’Italie même était en même temps accablée, c’est alors que les faits se développent à l’esprit, et que l’on y voit tout ce qui mérite notre admiration. C’est ainsi qu’on les connaît comme ils doivent être connus. Cela soit dit contre ceux qui s’imaginent que la lecture des histoires particulières suffit pour nous donner la connaissance d’une histoire générale et universelle. (Dom Thuillier.)


III.


Siége de Syracuse.


Les Romains, assiégeant Syracuse, pressaient les travaux avec soin ; c’était Appius qui les dirigeait. À partir de cette partie de la ville que l’on appelle le portique Scythique, et où le parapet du rempart s’avance au-dessus de la mer même, il le fit entourer d’une circonvallation par son infanterie. Ayant mis en œuvre les béliers, les traits, et toutes les autres machines de guerre à l’usage des assiégeans, il espérait, à cause de la multitude de ses travailleurs, parvenir en cinq jours à prendre l’ennemi tout-à-fait au dépourvu : c’est qu’il ne songeait pas, en effet, à l’énergie et à l’adresse d’Archimède, et qu’il ne réfléchissait pas que souvent le génie d’un seul homme est plus puissant que les bras les plus innombrables. Mais c’est ce que les Romains apprirent à leurs dépens ; car la ville étant d’ailleurs très-forte, puisque ses remparts étaient bâtis sur des lieux très-élevés et s’avançant en saillie, au point d’être inaccessibles, même lorsqu’ils n’étaient pas défendus, Archimède, de plus, avait rassemblé dans les murs de Syracuse une telle quantité de moyens de défense, tant contre les attaques par terre que contre les attaques par mer, que les assiégés non-seulement n’avaient pas besoin de beaucoup de temps pour se préparer à soutenir le siége, mais pouvaient encore faire promptement face à toutes les tentatives des Romains. Appius, ayant donc tout préparé pour le siége, se disposait à appliquer les béliers et les échelles aux murailles, du côté d’Hexapyle, à l’orient. (Ex Suida). Schweighæuser.


Marcus Marcellus attaque, avec une armée navale l’Achradine de Syracuse. — Description de la sambuque. — Inventions d’Archimède pour empêcher l’effet des machines de Marcellus et d’Appius.


Lorsque Marcus Marcellus attaqua l’Achradine de Syracuse, sa flotte était