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POLYBE, LIV. V.

en coûte beaucoup pour ramener par les armes les ennemis à leur devoir : la vertu le fait sans péril ni dépense. Enfin c’est à leurs sujets que les princes qui vainquent par les armes doivent la plus grande partie des heureux succès ; s’ils vainquent par la vertu, ils méritent seuls tout l’honneur de la victoire.

On dira peut-être que Philippe était alors si jeune, qu’on ne peut raisonnablement le rendre responsable du sac de Therme, et que ses amis, entre autres Aratus et Demetrius de Pharos, en sont plus coupables que lui. Sans avoir vécu de ce temps-là, on n’aura pas de peine à découvrir lequel de ces deux confidens a poussé son maître à cette extrémité. Outre qu’Aratus, par caractère, était prudent et modéré, et que la témérité et l’inconsidération formaient le fond du caractère de Demetrius, il se présentera dans la suite un cas pareil et bien attesté qui nous instruira du génie de ces deux personnages. Maintenant retournons à notre sujet.




CHAPITRE IV.


Philippe sort de Therme ; il est suivi dans sa retraite. — Sacrifices en actions de grâces. — Troubles dans le camp. — Punition de ceux qui en étaient les auteurs. — Légères expéditions des ennemis de Philippe et de ses alliés.


Philippe, ayant pris tout ce qui se pouvait emporter, sortit de Therme et reprit le chemin par lequel il était venu. Le butin et les soldats pesamment armés marchaient à la tête, les Acarnaniens et les mercenaires à l’arrière-garde. On se hâta de passer les défilés, parce que l’on prévoyait que les Étoliens profiteraient de la difficulté des chemins pour insulter l’arrière-garde. Cela ne manqua point : ils s’assemblèrent au nombre de trois mille, commandés par Alexandre de Trichonie. Tant que le roi fut sur les hauteurs, ils n’osèrent approcher, et se tinrent cachés dans des lieux couverts. Mais dès que l’arrière-garde se fut mise en marche, ils se jetèrent dans Therme, et chargèrent en queue. Plus le tumulte croissait dans les derniers rangs, plus les Étoliens, que la nature des lieux encourageait, redoublaient leurs coups. Le roi, qui s’attendait à cette attaque, avait, avant d’opérer sa descente, fait porter derrière une colline une troupe d’Illyriens et de fantassins choisis, qui, fondant sur les ennemis qui poursuivaient, en tuèrent cent trente, et n’en firent guère moins de prisonniers ; le reste s’enfuit en désordre par des sentiers détournés. L’arrière-garde, en passant, mit le feu à Pamphie, et, ayant traversé sans danger les défilés, se joignit aux Macédoniens. Philippe l’attendait à Métape. Le lendemain du jour où elle arriva, ayant fait raser cette place, il se mit en marche et campa proche d’Acres ; le lendemain, portant le ravage où il passait, il alla camper devant Conope, où il demeura le jour suivant, après lequel il marcha le long de l’Achéloüs jusqu’à Strate, où, ayant passé la rivière, il se logea hors de la portée du trait, et harcela de là les troupes qu’on lui avait dit s’y être jetées au nombre de trois mille fantassins, quatre cents chevaux d’Étolie et cinq cents Crétois. Personne n’ayant le courage de sortir des portes, il fit avancer son avant-garde, et prit la route de Limnée, où étaient ses vaisseaux.

L’arrière-garde avait à peine quitté la ville, que quelques cavaliers étoliens vinrent inquiéter les traînards. Ils furent suivis d’un corps de Crétois et de quelque infanterie étolienne, qui se joignit à la cavalerie. Le combat s’échauf-