Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/834

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
833
ARRIEN, LIV. IV.

sont repoussés par les Barbares et criblés de traits. Alexandre eut lui-même la jambe percée d’une flèche, et une partie du tibia entamée. Cependant le poste fut emporté ; un grand nombre de Barbares périt sous le fer des Macédoniens ; à peine dix mille échappèrent.




LIVRE QUATRIÈME.

Chapitre premier. Peu de jours après Alexandre reçoit une députation des Scythes de l’Asie, surnommés Abiens ; les plus justes des mortels, au rapport d’Homère, et les plus libres, grâce à cette vertu et à leur pauvreté. La famille nombreuse des Scythes de l’Europe députe également vers lui. Alexandre renvoie les premiers avec quelques Hétaires, sous prétexte de traiter d’alliance, mais en effet pour reconnaître la nature du pays, le nombre, les mœurs et les armes de ses habitans.

Il projette de bâtir une ville près du Tanaïs : la position du lieu lui paraît des plus avantageuses pour une place d’armes, s’il en a besoin, dans une expédition contre les Scythes, et pour la défense du pays contre les incursions des Barbares établis au-delà du fleuve. Il fonde la grandeur de cette ville sur l’éclat de son nom qu’elle doit porter et sur l’affluence des indigènes.

Cependant les Barbares, voisins du fleuve, tombent sur les garnisons macédoniennes, les égorgent, et mettent leurs villes en état de défense. À la sollicitation de ceux qui avaient livré Bessus, beaucoup de Sogdiens s’étaient réunis à eux, et avaient entraîné dans ce parti quelques Bactriens qui craignaient Alexandre, ou du moins quelques résultats fâcheux des délibérations de leurs chefs, dont il avait convoqué l’assemblée à Zariaspe, capitale du pays.

Instruit de leur défection, Alexandre donna ordre à son infanterie de se munir d’échelles, et marche lui-même sur Gaza. Des sept villes occupées par les Barbares, c’était la plus proche. Il détache Cratérus contre Cyropolis, la plus grande du pays, où beaucoup d’entre eux s’étaient retirés ; lui ordonne de camper sous les murs, de les cerner par une circonvallation, de dresser des machines, afin que les habitans, occupés à le repousser, ne pussent venir au secours de leurs voisins.

Arrivé devant Gaza, il fait de suite approcher les échelles et attaquer les murailles bâties en terre et peu élevées. Les archers, les gens de trait, les frondeurs mêlés à l’infanterie ou élevés sur les machines, font pleuvoir une grêle de traits sur les assiégés, les forcent d’abandonner le rempart ; on dresse les échelles ; les Macédoniens escaladent les murs ; Alexandre fait passer tous les hommes au fil de l’épée ; partage les femmes, les enfans et le butin, entre ses soldats. Il marche sur une seconde ville aussi peu fortifiée que Gaza, y entre le même jour ; elle subit le même sort. Le lendemain il en prend une troisième d’assaut. Cependant il envoie sa cavalerie cerner deux autres villes peu éloignées, pour empêcher que leurs habitans, instruits de sa marche et de la défaite de leurs voisins, ne prissent la fuite et lui ôtassent tous les moyens de les poursuivre.

Il ne s’était point trompé, les détachemens de cavalerie arrivèrent très à propos ; car les Barbares voyant la fumée des villes embrasées, informés d’ailleurs de leur désastre par quelques fuyards, sortent précipitamment de leurs murs, et donnent tête baissée dans la cavalerie qui les attendait en bon ordre, et qui en tue un grand nombre.

Ces cinq villes prises et détruites en

53