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THUCYDIDE, LIV. V.

contre des troupes nombreuses, unies pour la défense du pays, firent partir Démosthène, qu’ils chargèrent de ramener leurs soldats. Il arriva, feignit de vouloir les exercer hors de la forteresse à des combats gymniques ; et quand tout ce qui n’était pas Athénien fut sorti, il ferma les portes [et se délivra ainsi de ce qui lui était contraire] : plus tard cependant, les Athéniens ayant renouvelé leur traité avec les Épidauriens, leur rendirent les fortifications.

Chap. 81. Après qu’Argos eut rompu avec Athènes, Mantinée voulut d’abord résister ; mais, trop faible sans l’assistance d’Argos, elle accepta aussi l’alliance des Lacédémoniens, et renonça à la domination sur les villes qui lui étaient soumises. Lacédémone et Argos mirent sur pied chacune mille hommes ; quant à Sicyone, les Lacédémoniens, à leur arrivée, y firent seuls pencher la balance du côté des nobles, abolirent aussi dans Argos la démocratie et y substituèrent l’oligarchie, toujours chère à Lacédémone. Ces événemens eurent lieu à l’approche du printemps.

La quatorzième année de la guerre finissait avec l’hiver.

Chap. 82. L’été suivant, les Dictidiens, peuple du mont Athos, quittèrent l’alliance d’Athènes pour s’unir aux Chalcidiens. Les Lacédémoniens parvinrent à se concilier l’Achaïe, qui auparavant ne leur était pas favorable. Le peuple d’Argos se coalisa insensiblement, prit de l’audace, et attaqua les oligarques. Il attendit le moment où les Lacédémoniens célébraient les gymnopédies. On se battit dans la ville ; le peuple l’emporta, tua les uns, chassa les autres. Les Lacédémoniens furent long-temps à se rendre à l’invitation de leurs amis qui les appelaient : ils interrompirent enfin les gymnopédies et accoururent ; mais ils apprirent à Tégée que le peuple était victorieux, et, malgré les prières de ceux qui s’étaient échappés, ils ne voulurent pas aller au-delà ; ils retournèrent chez eux, et reprirent la célébration de la fête. Il leur vint ensuite des députations tant des Argiens de la ville que de ceux qui en étaient sortis. En présence des alliés, il y eut de part et d’autre de longues discussions, dont le résultat fut de déclarer coupables les Argiens de la ville. On résolut de marcher à Argos ; mais il y eut de nouveaux délais et du temps perdu. Le peuple en profita ; craignant les Lacédémoniens, il invoqua de nouveau l’alliance d’Athènes, dans l’espérance d’en tirer de grands secours. Il éleva aussi de longues murailles jusqu’à la mer, pour se ménager, s’il venait à être renfermé du côté de terre, la facilité de recevoir par mer les rafraîchissemens qu’on lui apporterait d’Athènes. Certaines villes du Péloponnèse fermaient les yeux sur la construction de ces murailles. Les Argiens y travaillèrent tous sans exception, eux leurs femmes, leurs esclaves, secondés de maçons et de tailleurs de pierres venus d’Athènes. L’été finissait.

Chap. 83. L’hiver suivant, les Lacédémoniens, qu’inquiétaient ces travaux, marchèrent contre Argos avec leurs alliés, excepté les Corinthiens. Ils comptaient sur un parti qui d’Argos même les secondait. Agis, fils d’Archidamus, roi de Lacédémone, commandait l’armée. Les intelligences qu’ils entretenaient dans la ville, et qui semblaient devoir les servir, leur furent inutiles ; mais ils enlevèrent et détruisirent les murailles, s’emparèrent d’Hysies, place de l’Argolide, égorgèrent tout ce qu’ils prirent d’hommes libres, puis se retirèrent et se rendirent chacun dans leurs villes respectives.

Les Argiens, à leur tour, marchèrent contre la Phliasie, et ne se retirèrent

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