Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/305

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
304
THUCYDIDE, LIV. V.

été, les Athéniens assiégèrent Scione et finirent par s’en rendre maîtres ; ils tuèrent les hommes en état de porter les armes, réduisirent en esclavage les enfans et les femmes, et donnèrent aux Platéens le territoire à cultiver. Ils rétablirent les Déliens à Délos, se souvenant des malheurs qu’eux-mêmes avaient éprouvés à la guerre, et voulant obéir à un oracle du dieu adoré chez les Delphiens.

Les Phocéens et les Locriens commencèrent la guerre. Les Corinthiens et les Argiens, dès lors alliés entre eux, se portèrent à Tégée pour la détacher de Lacédémone : c’était, à leurs yeux, une mesure décisive ; ils espéraient, s’ils réussissaient, avoir le Péloponnèse tout entier. Mais, les Tégéates ayant déclaré qu’ils n’entreprendraient rien contre Lacédémone, les Corinthiens, qui jusqu’alors avaient agi avec beaucoup de chaleur, se relâchèrent de leurs prétentions, appréhendant que personne ne se joignît plus à eux. Ils allèrent cependant trouver les Béotiens, et les prièrent d’accepter leur alliance et celle des Argiens, et d’agir sur le reste de concert avec eux. Les Béotiens avaient avec Athènes une suspension d’armes de dix jours, conclue peu après la trève de cinquante ans. Les Corinthiens les prièrent de les suivre à Athènes, de négocier pour eux un traité semblable ; et si les Athéniens le refusaient, de renoncer eux-mêmes à celui qu’ils avaient obtenu, et de ne traiter à l’avenir que d’un commun accord. Les Béotiens, à ces propositions, demandèrent du temps pour se déterminer sur l’alliance d’Argos. Cependant ils les accompagnèrent à Athènes : mais ils ne purent leur faire obtenir la suspension d’armes de dix jours. Les Athéniens répondirent que si les Corinthiens étaient alliés de Lacédémone, ils jouissaient de la trève. Ce refus ne put engager les Béotiens à renoncer à la suspension d’armes, malgré les instances des Corinthiens, qui leur reprochaient même de s’y être engagés. Il y eut d’ailleurs, sans traité, une armistice entre Corinthe et Athènes.

Chap. 33. Le même été, les Lacédémoniens, sous la conduite de Plistoanax, fils de Pausanias, roi de Lacédémone, portèrent la guerre, avec toutes leurs forces, en Arcadie : ils y étaient appelés par les Parrhasiens, peuplade sujette des Mantinéens, alors déchirée par des factions. Ils voulaient en même temps, s’il était possible, détruire les fortifications élevées par les Mantinéens à Cypsèles. Ceux-ci y avaient garnison, quoique cette place fût située sur le territoire des Parrhasiens, et limitrophe de la Sciritide, qui fait partie de la Laconie. Les Lacédémoniens ravagèrent le pays des Parrhasiens. Les Mantinéens remirent la garde de Cypsèles aux Argiens, et se contentèrent d’y entretenir garnison pour leurs alliés. Ils se retirèrent, dans l’impuissance de conserver et les fortifications de Cypsèles et leur domination sur les villes des Parrhasiens. Les Lacédémoniens firent ceux-ci autonomes, détruisirent les fortifications, et retournèrent chez eux.

Chap. 34. Le même été, revinrent de Thrace à Lacédémone les guerriers partis avec Brasidas : Cléaridas les ramenait après avoir conclu la trève. Les Lacédémoniens déclarèrent les Hilotes qui avaient combattu avec Brasidas, libres, et maîtres de choisir à leur gré le lieu de leur habitation. Mais peu de temps après, en différend avec les Éléens, ils les placèrent, avec les Néodamodes, à Lépréum, place située sur les confins de la Laconie et de l’Élide. Quant à ceux de leurs concitoyens prisonniers revenus de Sphactérie, où ils avaient rendu les armes, comme on craignait que, dans