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Au reste, quand on accorderait à M.Claude tout ce qu’il veut, c’est-à-dire que ce récit de Luther n’est qu’une Parabole, les choses n’en iraient pas mieux pour la Réforme; car, dans cette Parabole, le Diable fait toujours le premier personnage, qui est celui de Maître, et Luther n’y paraît que comme un Disciple trop soumis. Cela, comme on voit, n’est pas fort avantageux pour des gens qui regardent Luther comme leur premier Réformateur; et M.Claude dira tant qu’il lui plaira, pour éblouir ses lecteurs, qu’il n’y a rien en tout cela qui s’éloigne du devoir d’un honnête homme, ou qui ne soit du mouvement d’une bonne conscience; il ne le fera jamais croire à ceux qui ont tant soit peu de sens. Aussi M.Pajon, homme habile, et Ministre d’Orléans, s’est bien donné de garde, dans sa réponse au Livre des Préjugés, de relever l’endroit où il est parlé de cette conférence du Diable avec Luther; il a bien vu qu’il valait mieux se taire que d’imiter M.Claude, en ne disant que des choses absurdes, aussi contraires à la raison qu’au récit de Luther.

Un Ministre Anglais[1] a cru se tirer d’embarras, et en même temps persuader aux simples que la Messe était une invention du Diable, en nous objectant qu’on trouve dans les écrits de Surius, qu’un jour le Diable ayant pris la figure d’un Ange, s’apparut à un certain Abbé, et l’exhorta à célébrer la Messe.

Mais il n’y a qu’à lire cette histoire, pour y voir tout le contraire de ce que ce Ministre veut établir, et pour être convaincu de sa mauvaise foi. Voici comme la chose est rapportée dans Surius au premier jour de Juin:[2] «Le saint homme Siméon eut ordre d’aller sur le mont Sinaï, et d’y demeurer quelque temps: il fit ce qu’on lui commandait; et l’Ennemi ancien lui dressa de nouveaux pièges pour le surprendre. Le Démon l’exhorta une nuit à célébrer la Messe: mais Siméon, qui n’était ni endormi ni éveillé tout à fait, lui soutint que personne ne devait exercer ce ministère sans avoir l’ordre de Prêtrise. L’Ennemi redoubla ses instances, en lui disant qu’il était. Ambassadeur de Dieu; que Jésus-Christ voulait cela et qu’il ne fallait pas que

  1. Mortonus in Apol. Anglicana, part. I, lib. 2, cap. 21, pag. 351.
  2. Apud Sur., ad. I. Junii.