fois, Boisdru prenait des ribotes. Dans ce temps-là, Mme Boisdru devait lui faire la leçon. Ce matin même le cher homme arrivait du village un peu éméché, et on sait le reste.
— Bonjour, Mme Boisdru, dit M. de Verneuil, votre mari est-il ici ?
— Oui, Monsieur, il est ici, mais il n’est pas en état de vous recevoir. Il vient d’arriver plein jusqu’au cou ; aussi je l’ai envoyé se dégriser dans sa chambre. C’est qu’il ne me mène pas comme il veut, je le plaindrais ; je sais lui trouver les côtes. Asseyez-vous, M. de Verneuil.
— Non, Madame, merci, je ne peux être longtemps, j’étais venu pour lui parler de l’auberge. M. le Curé voudrait qu’elle disparaisse, si l’on pouvait réussir ?
— Vous avez grandement raison, Monsieur, de faire la guerre à cette infâme boisson. Que je plains les pauvres femmes qui ont des ivrognes. Le mien n’en prend que de temps à autre et si je ne me retenais pas, je l’assommerais… ! mais, c’est encore de valeur ! il faut bien porter sa croix ! Dans tous les cas je vous encourage, mes belles-sœurs et moi, nous allons bien prier pour que vous gagniez votre cause.
Sur ce, M. de Verneuil prit congé de Mme Boisdru. En s’en allant, il se dit : j’en ai assez pour aujourd’hui, je suis convaincu que nous devons travailler avec encore plus d’ardeur et que le bon Dieu ne pourra que bénir nos efforts.