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AUTOUR D’UNE AUBERGE

tout avec politesse. N’était-il pas le digne représentant de Sellier, seigneur et maître de la place ? Quelques jeunes gens, cependant, à la grande surprise de Rougeaud, semblaient plus froids qu’à l’ordinaire… Bah ! après tout, se dit-il, notre affaire est en excellente voie. Jamais on n’aura l’audace de nous résister. Ils sont à la crèche ; et quand un homme sent la faim, il réfléchit à deux fois pour faire un coup de tête. Rassuré, par cette réflexion, il s’en revint chez lui, tout fier de son succès.

Sa tâche n’était pas finie ; le lendemain, comme il devait se transporter dans le rang du haut de la rivière, il devint plus perplexe. C’est là qu’habitent ce diable de Verneuil et le vieux Bonneterre. S’il fallait, se disait-il en lui-même, que je les rencontre ! De Verneuil a la parole facile, et pourrait bien battre la campagne. Par où commencer ? il en était là, lorsque tout à coup une idée qu’il trouva lumineuse lui traversa l’esprit. Le démon laisse rarement ses amis sans leur envoyer des secours en temps opportun. Tandis que les bons catholiques aiment mieux fuir la lutte, les mauvais, eux, sous l’inspiration de Satan, savent toujours combiner des plans pour réussir, dans leurs projets. — Tiens, se dit-il, ce soir il y a une partie de cartes chez Jean-Baptiste Latulle, si j’y allais ! Je pourrais, sans qu’il y paraisse le moins du monde, sonder le terrain. Groleau, Bancheron, Poulin seront peut-être là ? Qui sait, si ce