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AUTOUR D’UNE AUBERGE

midité le joyeux groupe de bons Canadiens à la figure ouverte et dont la charité est proverbiale, il demanda l’hospitalité à l’un d’entre-eux qu’on appelait Jean-Baptiste Labonté. Il avait été l’un des premiers habitants de l’endroit. Labonté tendit sa main loyale à cet étranger, et lui fit signe d’entrer dans son logis. Le jeune homme, fatigué, sans doute, par une longue marche, se laissa choir sur un siège en attendant le souper dont il trouva les mets exquis ; et fit ainsi honneur à ce frugal repas, offert de si bonne grâce. Labonté le regardait manger avec un réel plaisir ; puis, charmé par sa bonne conversation, finit par l’inviter à se reposer. L’étranger, de son côté, ne parut pas indifférent aux bons procédés de son hôte qu’il remercia avec effusion. Devenu plus hardi, il demanda s’il ne pourrait trouver quelque emploi dans le pays ?

— De métier, dit-il, je n’en ai pas ; toute ma fortune est contenue dans ce mouchoir de coton rouge ; mais, j’ai du cœur, je peux et je veux gagner mon pain ; je ferai la besogne qu’on voudra me confier. Mon nom est Pierre Sellier ; vous avez dû remarquer, mon cher Monsieur, par mon accent, que je suis français.

Ce titre, de tout temps, a attiré la sympathie de nos pères. Il suffisait qu’un Français vînt à passer par le pays pour qu’il fût comblé d’honneurs. Nos pères sont toujours demeurés attachés à la France par le cœur et par la langue ; ils n’avaient pu croire que la