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AUTOUR D’UNE AUBERGE

« D’autres fois, il voyait des animaux autour de lui dans la chambre. Des serpents, disait-il, voulaient l’étouffer, des morts lui apparaissaient et lui reprochaient ses fautes. M. le Curé, je suis si fatiguée de passer des jours et des nuits à le veiller que je n’en peux plus. On me conseilla de faire mander encore une fois le docteur. Il vint, et me dit qu’il souffrait du “ Delirium Tremens, ” causé par la boisson. Il lui donna des remèdes qui le calmèrent ; je pus me reposer un peu.

« Je le croyais guéri, quand hier il eut une nouvelle attaque. Heureusement que mon beau-frère était ici, car il se serait tué. Je suis forte, M. le Curé, cependant, Jean-Marie et moi nous avons dû l’attacher. Il avait, semble-t-il, passé une assez bonne nuit, sous l’effet des calmants que je lui avais donnés. Voyant cela, ce matin, je l’ai détaché. J’étais si fière de le croire mieux, et puis, ça me broyait le cœur de le voir attaché sur ce lit. Je lui ai parlé ; il m’a répondu sensément. Il y avait à peine un quart d’heure que je l’avais laissé seul, quand la petite fille vint me chercher à la course. — « Venez vite, maman, dit-elle, mon père est pendu » — Pendu ! grand Dieu ! est-ce possible ? Pauvre Boisdru, il s’était pendu avec la corde qui l’avait lié. Il était monté sur une chaise, avait passé la corde autour du soliveau, et avait reculé la chaise avec ses pieds… »