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CONCLUSION

Tel nous apparaît Alain-René Lesage, dans son existence, dans son œuvre et dans sa postérité littéraire. Il eut une bonhomie et une adresse toutes bourgeoises, dans l’emploi de son talent comme dans la conduite de sa vie. Il chercha le bonheur à son foyer domestique, dans la pratique discrète de ses devoirs de chef de famille et d’ami, et il ne demanda au monde et aux tripots littéraires que des modèles vivants pour ses livres et des plastrons pour sa verve. Il est le premier écrivain français qui ait résolu le problème de vivre de sa plume avec honnêteté et indépendance. Il fit deux parts de son talent, dont il dépensait l’une tout autant qu’il le fallait pour nourrir l’autre. Il eut ainsi le loisir de consulter longtemps son esprit et ses forces, de choisir ses modèles dans les littératures anciennes et modernes, et surtout dans le grand livre du monde, d’évoluer lentement de l’imitation vers l’originalité, en passant, avec une prudence méthodique et une extraordinaire souplesse, par toutes les phases de la tra-