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CHAPITRE III

SA MORALE

Mais une représentation si exacte de la comédie humaine était-elle inspirée à son auteur par quelque vue supérieure à cette exactitude même ? Et, pour préciser, une conception si réaliste de la vie dégage-t-elle une morale suffisamment claire et impérativê ? En France, moraliser était une loi de la comédie, au moins depuis Molière, et avait toujours servi de prétexte et d’excuse aux importateurs des « œuvres vertes » des picaresques espagnols. Le goût de leur clientèle pour les moralités était même si prononcé que d’Audiguier, en traduisant l’Obrégon, avait extrait et signalé à part celles qu’on allait goûter dans chaque chapitre de son auteur, « le Sénèque espagnol », au dire de Lesage. L’auteur du Gil Blas ne pouvait donc se soustraire à l’obligation de moraliser. Mais il l’entendait à sa manière, qui n’était pas celle d’Audiguier, ni d’Aleman, et différait encore