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— Ah ! mon vieux, le gros cafard… Non, ne me dis rien !… le gros cafard !…

Il a fait, dans un village proche, à Damvillers, je crois, la conquête d’une petite marchande de tabac. Et il trouve des pipes, du papier à lettres, des liqueurs, même du champagne, là où depuis longtemps personne ne découvrait plus rien.

À la brune, il nous fait signe, à Déprez et moi. Il se tient à l’entrée du corps de garde, près du grand Le Bidois, debout et appuyé sur son sabre. Ce poste est installé dans une cahute branlante que seule maintient debout l’étreinte d’un lierre vigoureux. La porte n’a qu’un gond, et l’escalier qui conduisait au grenier est tombé en poudre. Nous sommes bien tranquilles ici pour boire le champagne dans nos quarts.


Mercredi 19 août.


La première pièce possède un attelage qui fait la joie de toute la batterie : Astruc et son sous-verge Jéricho. Astruc, haut comme une botte, presque pas de jambes, un corbin de rapace, des yeux noirs drôles ; Jéricho, une sale bête qui rue, mord et refuse de se laisser panser. Astruc lui tient des discours, et, chaque matin, le salue comme un vieil ami un peu lunatique qu’on aime bien.