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sombres des uniformes de l’artillerie et du génie. On se coudoie. Des hommes, portant un seau de toile plein d’eau à chaque bras, crient et jurent pour qu’on leur fasse place.

Il pleut toujours. Des fumiers, qui s’étalent de chaque côté de la route, devant les portes, monte une buée épaisse. Les cavaliers se sont fait des capuchons avec les couvertures de leurs chevaux. Beaucoup de fantassins s’abritent la tête et les épaules sous des sacs de grosse toile bise, trouvés dans des granges ou dans des fourgons. Cette cohue est à peu près silencieuse, toute crottée, uniquement inquiète de trouver au plus vite l’abri du cantonnement. On n’entend presque qu’un grand bruit de pas dans la boue. Quatre sapeurs, qui montent à un grenier d’où déborde du foin par une lucarne sombre, béante, font en l’air, sur une échelle, une pesante grappe noire.


Lundi 17 août.


Il pleut encore. Nous partons. Les charrettes de défroques, plus pantelantes, plus lamentables, nous dépassent.

Un chasseur, que j’avais vu hier matin monté sur un petit cheval bai, a été surpris par les uhlans. Ils l’ont ligoté et, d’un coup de lance dans le cou,