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prit. Il fallut abandonner les marmites sur le feu pour chercher un refuge sous les caissons ou à l’abri des arbres. Aujourd’hui il pleut lentement, mais sans arrêt. Si ce temps continue, gare la dysenterie !


Assis sur des couvertures, en rond autour du feu que le trompette-cuisinier debout surveille patiemment, nous buvons le café. Les camarades me prient de leur lire quelques feuilles de ce carnet. Ils me souhaitent le retour afin que ces notes, ces souvenirs qui sont beaucoup les leurs, voient le jour.

— Tu laisseras les noms ?

— Oui, à moins que ça ne vous embête.

— Mais non, au contraire. On montrera ça à nos vieux et à nos mioches, plus tard, si on revient.

— Si je suis tué, vous prendrez mon carnet. Je le mets là, dans la poche intérieure de ma chemise.

Hutin réfléchit :

— Oui, seulement, tu sais qu’il est défendu de fouiller les morts. Tu feras bien de marquer que c’est toi qui nous l’as dit sur ton carnet.

C’est juste. J’écris donc sur la première de ces pages : « Au cas où je serais tué, je prie mes camarades de conserver ces feuilles jusqu’au