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canon ne cessera certainement pas de reculer et un perpétuel dépointage ralentira notre feu. La deuxième pièce n’est pas mieux placée ; mais l’autre section, sur des chaumes, jouit d’un terrain bien plus solide. Ainsi la batterie va perdre toute homogénéité. À cela, il n’y a point de remède. On ne peut mieux utiliser l’emplacement qu’on nous a assigné.

Devant nous, des 77 balayent le champ. Ce ne sont pas eux qui nous inquiètent beaucoup. Par rapport à la position que, d’après leur tir, ils doivent occuper quelque part vers le nord-est, nous sommes bien défilés.

Mais, par delà Lassigny, en tache claire dans les verdures, se dressent de grandes collines boisées qui dominent tout le pays et du haut desquelles notre batterie est certainement visible. Nos regards ne peuvent se détacher de ces hauteurs menaçantes. Que cachent-elles dans leurs forêts sombres ?

Nous sommes certainement à portée de l’artillerie lourde, si l’ennemi en a installé là-bas.

— Allons, dit Bréjard, il faut se creuser un trou et faire vite.

Fiévreusement, on ouvre une tranchée derrière le caisson. Un groupe de 75, dont les positions proches sont perpendiculaires aux nôtres, ouvre le feu sur Lassigny.