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grands frissons, ne vous tue sournoisement si l’on s’endort.

Les pieds traînants sur une roue, je me blottis en chien de fusil sur le caisson. Je préfère le contact glacé de l’acier à l’humidité de la terre. Il pleut plus dru.


Mercredi 16 septembre.


De bonne heure un coup sourd, lointain, d’obusier a roulé d’abord d’écho en écho. Et tout de suite, comme par l’effet d’une traînée de poudre, toutes les pièces établies sur le plateau se sont mises à tonner.

Astruc m’aborde :

— Ah ! mon vieux, me dit-il, il m’en est arrivé une affaire cette nuit ! Figure-toi… les copains avaient pris toute la place sous les caissons. J’aperçois un grand type, un double-mètre, qu’était couché sous sa couverture, au milieu du champ… Je me dis : « Quand il y en a pour un, il y en a pour deux. » Je relève la couverture et je me niche dessous, près de lui. Mais voilà qu’en dormant je la tire petit à petit… Alors, voilà mon double-mètre qui s’éveille, qui se dresse et qui se met à me secouer !… D’abord, je ne dis rien… je fais le mort. J’étais si fatigué ! Mais il ne me lâchait pas, et puis il me criait : « — Qu’est-ce que