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L’eau manque. Pour en trouver, il faut suivre un chemin d’exploitation qui conduit à des granges. Deux citernes reçoivent l’égout des toits. Une échelle est appuyée contre l’une d’elles. J’y monte par curiosité. La tôle à l’intérieur est rouillée et, de l’eau trouble qui baisse, émergent une vieille botte, un chapeau de feutre et toutes sortes d’objets informes de toile ou de métal, gluants de limon vert. Il faut pourtant se contenter de cette eau !…


Le bruit de la bataille n’annonce aucune décision. Il ne se rapproche ni ne s’éloigne. Les blessés qui passent nous disent que l’infanterie déferle depuis le matin contre d’énormes retranchements, sans pouvoir les entamer. La canonnade ne s’apaise qu’à la nuit.

À travers le plateau que les ténèbres montantes, à cette heure, dissimulent à l’ennemi, nous rejoignons les batteries. Quelque part, une mitrailleuse crépite encore. Une pluie fine sans poids, qui mouille vite, commence à flotter dans l’air. Il faut camper en plein champ, sur les betteraves. La terre est molle, les roues enfoncent. Nous ne dételons pas les chevaux.

Comment prendre du repos ? Tout de suite on grelotte, on claque des dents. On craint vaguement que ce froid, qui vous passe dans le dos en