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façon formidable sur des hauteurs boisées et dans des carrières. La poursuite est arrêtée. Une nouvelle bataille s’engage.

Je demande à un sergent :

— Mais ce ne sont pas ceux qu’on talonnait hier et avant-hier qui font face ainsi ?

— Non, me répond-il. Ce doit en être d’autres qui dévalaient derrière eux de Belgique.

L’échelon, établi dans un étroit ravin, ravitaille de demi-heure en demi-heure la batterie qui, installée près d’une grande ferme, vide caisson sur caisson. L’artillerie allemande balaye le plateau, et des obusiers de 150, cherchant à atteindre le coude d’une route voisine, tirent long, et d’un instant à l’autre peuvent nous prendre en enfilade. D’autre part, une batterie de 77 ouvre le feu sur un bois qui commande l’autre issue du vallon. On ne peut songer à sortir d’ici en passant sur le plateau ; l’ennemi le découvre et ses obusiers nous atteindraient sans peine. Le lieutenant Boutroux, qui commande les échelons, est perplexe. Il se décide à affronter les 77. À la lisière du bois, nos voitures défilent. Des shrapnells éclatent au-dessus de nos têtes. Le ravin s’incurve. La zone dangereuse est franchie. Indemnes, à travers des cheminements invisibles à l’ennemi, nous allons nous établir plus loin, au fond d’un ravin tout pareil.