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Trois pièces tirent encore. Il faut que le commandant répète l’ordre en hurlant.

Les hommes s’épongent, rouges, suants. Les bras croisés, debout derrière leurs pièces, sans parler, ils contemplent ces champs dont pas un pouce n’a été épargné.

Nous attendons maintenant l’ordre de battre en retraite à notre tour.

C’est un ordre de passer la nuit ici qui nous arrive. On nous envoie un bataillon d’infanterie de soutien. À deux cents mètres du parc, qu’il a fallu former sur place, les fantassins se déploient en tirailleurs et s’immobilisent sur le champ.

En avant, on dit qu’il ne reste aucun élément français. Nous sommes à la merci d’une attaque nocturne de cavalerie.


Jeudi 10 septembre.


Après la journée d’hier, nous nous attendions à une furieuse canonnade dès le lever du jour. Et tout se tait… Le soleil éclaire largement la plaine et les pentes où, immobiles, en batterie, nous attendons l’ennemi. Pas un coup de canon n’a encore été tiré. On est surpris… On se méfie.

Un lieutenant-colonel, qui passe à la tête d’un bataillon, reconnaît le commandant et l’aborde :

— Tiens, Solente !