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— Oui, dit-il, ils bombardent les bois qu’ils ne bombardaient pas hier. Mais cela prouve au moins qu’ils n’y sont pas. Peut-être, au contraire, se trouvent-ils menacés de ce côté-là par un mouvement enveloppant de nos troupes… Sait-on ?… Et puis, s’ils nous tournent, nous ne sommes pas seuls ici… Nous ferons face.

Il appuie sur nous le regard gris bleu de ses yeux intelligents et fiers qui nous sondent. Il répète :

— Nous ferons face ?

— Bien sûr !

Le café est chaud. Le capitaine tire de sa poche son gobelet d’aluminium et puise dans la marmite le jus noir qui fume. Tous les hommes de la pièce, debout à son côté, le quart à la main, attendent. Lorsque le capitaine s’est servi, tour à tour, ils se penchent pour prendre leur part. On se tait : on savoure le café.

Puis le cuistot déclare :

— Il y a du rab !

— Combien ? demande le capitaine, soucieux de ne faire tort à personne.

— Chacun un bon demi-quart.

Le capitaine se sert, puis les hommes. Et, comme il reste un peu de café mélangé de marc, du « rab de rab », une fois encore l’opération recommence.

Avec cette effrayante soudaineté que nous avons