Page:Lintier - Ma pièce, 1917.djvu/229

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

droite. Ordre du commandant. Inutile de se faire tuer tant qu’on ne tire pas.

On s’appelle, on sort des fumées, on s’écarte de la ligne de tir des obusiers. Mais le feu de l’ennemi nous poursuit sur le champ où nous courons éparpillés, tendant le dos.

Un obus, dont l’éclair m’aveugle, couche à mon côté un maréchal des logis de la 12e batterie. Tout de suite l’homme se relève. Deux éclats lui ont ouvert, au-dessus des yeux, deux trous rouges d’une atroce symétrie. Il s’éloigne, le front en avant, pour que le sang ne lui coule pas dans les yeux. Je veux le soutenir. Il me dit :

— Laisse-moi… Trotte. Ce n’est rien… La boîte n’est pas démolie.

Derrière de grosses meules, nous nous dissimulons en attendant des ordres.

On se compte :

— Onzième ?

— Onzième !

— Hutin ?

— Présent !

— Pas blessé ?

— Non. Et toi ?

— Rien.

Les quatre pelotons de pièce sont au complet.

— Et le capitaine ?

— Toujours là-bas, au poste d’observation. Re-