Page:Lintier - Ma pièce, 1917.djvu/224

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que des châssis hérissés d’éclats de verre. À travers, les rideaux salis flottent à l’extérieur. Des contrevents arrachés gisent sur le trottoir parmi des bouteilles brisées, des débris de carreaux et des boîtes de conserves. D’autres, qui ne tiennent plus que par un gond, battent les façades.

On voit, par les portes grandes ouvertes, des armoires fracturées, abattues au milieu du logis. Les tiroirs vidés, les bibelots des cheminées, des portraits, des gravures jonchent les intérieurs carrelés de rouge. De la lingerie, des draps maculés de boue, marqués de gros clous, traînent jusqu’au milieu de la rue, donnant à ces malheureuses maisons un peu de l’horreur des corps éventrés.

Des meubles jetés par les fenêtres, des voitures d’enfants, des futailles défoncées encombrent la chaussée. Du bois craque sous les roues du caisson. Un corset rose traîne au ruisseau.

Sur une plaque Michelin, à la sortie du village, je lis : « Attention aux enfants. — Sennevières. » Et, sur le revers, l’inscription « Merci » est dérisoire et lamentable.

Nous nous arrêtons sur la route qui tire un grand trait blanc à travers une plaine de betteraves. Un hangar, trois meules, au loin des petits bois à formes géométriques, une grande ligne de peupliers, rompent seuls la morne nudité de ces champs. Au nord, à l’est, la bataille gronde, siffle,