Et voilà que, brusquement, l’ennemi commence à bombarder Tailly et les sapinières qui dominent notre position. Des avant-trains, établis depuis ce matin à la lisière des bois, s’éloignent en hâte. Une section d’infanterie émerge de la fumée d’un obus explosif.
Le capitaine de Brisoult commande :
— Abritez-vous !
Peu à peu, le feu de l’artillerie française se ralentit.
Au-dessus du vallon, où nos attelages attendent, une volée de shrapnells éclate ; une fusée longtemps chantonne en l’air. Personne, là-bas, ne semble blessé. Immobiles, les avant-trains font sous le soleil un rectangle noir sur l’herbe.
Une batterie installée de l’autre côté de la sapinière a dû être repérée par l’ennemi. Sous un feu infernal d’obusiers, elle ramène ses pièces une à une à travers bois.
Hutin, qui s’abritait derrière le bouclier, soudain se dresse pour voir. Il se croise les bras :
— Ça y est ! grogne-t-il.
— Qu’est-ce qui y est ? Abrite-toi donc !
Je le tire par sa veste.
— Ça y est ! La retraite ! Ah ! bon Dieu de bon Dieu !
Je me dresse aussi. En effet, des sections d’infanterie franchissent les crêtes et se replient.