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Des femmes et des enfants debout, immobiles, en groupe, contemplent silencieusement les Allemands. Des canonniers, par curiosité, sont allés voir ; les uhlans les regardent avec des yeux bleus troubles et tristes.

Tuvache déclare :

— Ils n’ont pas une aussi sale bobine que j’aurais cru.

— Tu te figurais peut-être, lui répond Millon, qu’ils avaient un œil supplémentaire au milieu du front, comme les habitants de la lune ?

Tuvache hausse les épaules :

— Non, seulement je les croyais plus vilains. Ils n’ont pas l’air si mauvais que ça.


On se bat rudement ce matin dans la trouée de Beauclair. L’ennemi cherche à forcer le passage. Le grand bruit de marée montante sur les roches, où viennent concourir tous les bruits de la bataille, ne s’interrompt plus.

— En avant ! Au trot !

Trois cents mètres sur la route de Beauclair… ; on nous arrête encore. Des soldats blessés aux mains, aux bras, aux épaules, reviennent du combat. Tous sont pansés. Ils s’attardent volontiers pour nous demander de l’eau, ou nous prier de leur rouler une cigarette. On cause.

— On avance ?