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D’ailleurs, ces émotions restent à fleur de peau. Si les yeux reflètent une angoisse, nous gardons le sourire et nous nous affirmons à nous-mêmes que tout à l’heure nous ferons ce qu’il faudra pour que la bataille qui se livre soit une victoire française.

Le colonel passe, accompagné du capitaine Maunoury et d’un état-major de lieutenants. Il promène sur nous un regard calme, clair, qui nous jauge et nous encourage à la fois. Ce peloton de cavaliers s’éloigne vite, gravissant les pentes que bombarde l’ennemi.

— Garde à vous !

Nous allons nous battre.

Au flanc des collines en fer à cheval, des sections d’infanterie se déploient et progressent par bonds. Tout à coup, les hommes se dressent, courent sur le champ, et soudain, à un commandement que l’on n’entend pas, s’abattent, disparaissent comme dans des trappes. Les fantassins s’éloignent, on les voit encore en silhouettes sombres, l’espace d’un instant, lorsqu’ils franchissent la crête.

Il fait chaud. Il est environ dix heures. Du pays inconnu, qui s’étend de l’autre côté des collines, nous vient le bruit formidable de la bataille. La fusillade pétille. Les mitrailleuses font un vacarme pareil à celui des vagues s’écroulant sur des brisants. Le tonnerre de l’artillerie enveloppe tous