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même un proverbe : Quot servi tot hostes ; ce que Sénèque a relevé avec beaucoup de vigueur[1].

Que les empereurs aient amélioré le sort des esclaves ; qu’ils aient défendu de les mettre à mort, si ce n’est sur la condamnation des magistrats ; qu’ils aient puni comme homicide le maître qui, sans motifs, aurait tué son esclave ; toutes ces modifications dépendent de causes politiques ou religieuses que je n’ai point l’intention d’examiner.

Les barbares étaient loin d’être aussi cruels que les Romains envers leurs esclaves[2] ; et plus tard, dans les siècles derniers, les flibustiers et les boucaniers traitèrent leurs esclaves nègres avec beaucoup d’humanité : cela se conçoit. Les peuples grossiers, par la simplicité de leur état social, conservent plus vivaces les sentiments de l’égalité primitive et de la dignité humaine, sentiments qui ne s’effacent qu’à mesure que les nations se corrompent.

Voilà quelle était la condition des esclaves chez les anciens. Il est impossible de la concevoir plus malheureuse. Certes, si les nègres, car il y en avait dans toutes ces contrées, avaient été l’objet d’un préjugé spécial, nous ne comprendrions plus alors à quels excès de barbarie se seraient portés les maîtres. Lorsqu’on en trouve d’assez cruels pour

  1. Erasm. adag. 31. p. 358. Fest. act. 1. se. 1. Senec. épist. 47.
  2. Tacit. de mor. germ. c 25.