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PREMIÈRES ÉTUDES MUSICALES 29

commençât à se révéler. Il assista d'abord pendant quelques temps aux leçons de piano de ses sœurs, sans y prendre part lui-même, étant absorbé, à ce moment, par ses études classiques. Puis on se décida à lui faire donner des leçons par un précepteur qui expliquait avec lui Cornélius Nepos ; mais à peine le jeune Richard eut-il acquis quel- ques vagues notions sur le mécanisme du piano qu'il se mit à apprendre, en secret et sans musique, l'ouver- ture du Freischùtz ; son maître, l'ayant surpris un jour qu'il exécutait de mémoire cette ouverture avec des doigtés fantastiques, déclara « qu'on ne ferait jamais rien de cet enfant-là ». « Et, conclut Wagner, il avait raison, car, de toute mon existence, je n'ai pu apprendre à jouer du piano. » Pour l'instant, il avait pris en dégoût la technique du piano, de même que, quelques années auparavant, il s'était dégoûté de la technique du dessin ; et comme il était incapable de jouer proprement un passage brillant, il conçut dès cet âge tendre une très grande horreur pour toute espèce de traits et de fioritures. Quand il décida qu'il deviendrait musicien, Wagner n'avait aucun talent appréciable sur aucun instrument. Deux grands compositeurs allemands vers lesquels il se sentit attiré puissamment aussitôt qu'il les connut lui révélèrent sa vocation musicale : c'étaient Weber et Beethoven. Il connut d'abord Weber, qui depuis 1817 remplissait les fonctions de Kapellmeisler à l'opéra de Dresde. C'était l'époque où Weber, champion convaincu de l'art national, s'efforçait de créer un opéra allemand en face de l'opéra italien qui jouissaif alors de la faveur à peu près exclusive de la cour et d'une grande partie du public. Vivement combattu par une cabale puissante à la tête de laquelle se trouvait le chef d'orchestre de l'opéra italien, Morlachi, il dut soutenir, au nom de l'art alle-