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passionnée pour l'antiquité grecque, admiration qui resta toujours vivace, qui lui donna plus tard l'idée de traduire en drame musical la légende d'Achille, et qui surtout lui inspira quelques-unes de ses idées essentielles sur la ré- forme de l'opéra moderne. Et s'il renonça à la littérature pure, s'il ne devint pas un brillant humaniste comme son oncle Adolphe Wagner, il amassa du moins pendant ses années d'études une provision d'idées générales que n'avait eue avant lui aucun des grands musiciens alle- mands, ni Bach, ni Mozart, ni Beethoven. Son esprit resta ouvert, désormais, à tous les grands problèmes littéraires, philosophiques ou moraux que se posèrent ses contem- porains, et toute sa vie il demeura fidèle à la résolution qu'il avait prise comme enfant de onze ans : il fut un poète dramatique — un dramaturge d'une espèce particu- lière, il est vrai, puisqu'il s'exprimait simultanément par la langue de la poésie et par celle de la musique — mais avant tout et toujours un poète dramatique. Le goût de la musique se développa relativement tard chez Wagner ; et tandis que presque tous les grands musi- ciens ont été de bonne heure des virtuoses et ont appris à fond, dès leur enfance, la technique d'un instrument — piano, orgue ou violon — il ne montra jamais aucune disposition particulière pour un instrument quelconque. Comme enfant, on lui avait appris à jouer sur le piano une petite romance Ueb' immerTreu'und Redlichkeit ( " sois toujours loyal et probe ») et le chœur des jeunes filles du Freischütz ; la veille de sa mort, Geyer se fit jouer par lui ces deux mélodies, et, depuis la chambre voisine, l'enfanl entendit le malade dire à sa femme d'une voix affaiblie: « Aurait-il peut-être du talent pour la musique ? » Le petit Richard avait alors huit ans et des années se passèrent encore avant que ce talent pressenti par le pauvre Geyer