Page:Lichtenberger - Richard Wagner, poète et penseur, 1907.djvu/35

Cette page n’a pas encore été corrigée

Albert, qui avait commencé des études médicales, les in- terrompit pour se lancer lui aussi dans la carrière drama- tique ; il devint d'abord chanteur, puis régisseur d'un théâtre de Berlin et eut deux filles cantatrices, dont l'une Johanna Wagner acquit plus tard un renom considérable dans toute l'Allemagne, et incarna avec une rare perfection la touchante figure d'Elisabeth aux premières représen- tations de Tannhâuser en 1845. A cet instinct de famille indéniable qui aurait pu pousser le jeune Richard vers le théâtre venait encore s'ajouter l'influence du milieu qui agissait dans le même sens. Sa vie s'écoulait dans un monde d'artistes : tout petit déjà il accompagnait fréquem- ment Geyer aux répétitions et connut ainsi dès sa plus tendre enfance le monde des coulisses ; à la maison, Geyer réunissait volontiers autour de lui ses collègues du théâtre de Dresde et à l'occasion on des fêtes de famille il faisait souvent représenter chez lui des pièces de circonstance qu'il composait lui-même et qu'il jouait avec les amis de la maison; la mort de Geyer ne changea pas Wagner de mi- lieu, puisqu'autour de lui son frère et ses trois sœurs sui- virent à leur tour la carrière dramatique. Il résista toute- fois à l'influence héréditaire comme à celle du milieu. Ses parents ne le destinaient pas au théâtre et il ne paraît ja- mais avoir songé un seul instant à monter sur les planches. Bien au contraire, il éprouva dès sa jeunesse, à l'endroit des « comédiens fardés » une sorte de répulsion ; peut- être la tenait-il de son oncle, Adolphe Wagner, qui avait en médiocre estime la vie d'acteur qu'il jugeait dé- cevante et démoralisante. Mais si le métier de comédien ne paraît pas l'avoir attiré plus que celui de peintre, il est à peine besoin de faire remarquer combien précieuse fut pour lui, dans la suite, l'expérience précoce des choses du théâtre quil acquit au contact journalier des comédiens :