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IV

Lohengrin

Le sujet de Lohengrin s'est dessiné dans l'imagination de Wagner presque en même temps que celui de Tannhàuser. Il lui fut révélé pour la première fois lorsqu'à Paris, au printemps de 1842, il lut, pour préparer son Tannhàuser, le poème du Tournoi de la Wartbourg. On se souvient que ce tournoi légendaire se termine par une sorte d'assaut d'érudition entre Wolfram d'Eschenbach et Klingsor. Or dans l'une des rédactions du poème, Klingsor interroge Wolfram sur Artus et la Table ronde, et Wolfram riposte en racontant l'histoire de Lohengrin. Ce récit, visiblement surajouté vers la fin du XIII° siècle au poème plus ancien du Tournoi des chanteurs, a été composé par un jongleur originaire de Bavière et ne possède qu'une très médiocre valeur poétique. Wagner n'en vit d'abord ni la portée morale ni l'intérêt dramatique. Il fut mis en défiance par le coloris mystique donné à la légende par le jongleur ; son récit lui rappelait « ces images de saints sculptées, et peinturlurées que l'on rencontre sur les chaussées et dans les églises des pays catholiques (1) ». Peu à peu cependant cette impression déplaisante s'effaça. Il étudia le mythe de Lohengrin dans ses différentes variantes allemandes ou

(1, Ges. Schr. IV, 28^. Les tendances religieuses du Lohengrin bavarois sont eu effet très visibles : Elsa accusée par Telramund prie Dieu sur le conseil de son chapelain. La cloche de la chapelle d'Elsa tinte d'elle- mème, saus aucune iutervention humaine, pour appeler un défenseur. Lohengrin mourant de faim en traversant la mer avec son cygne, prie celui-ci de pécher quelque nourriture pour lui ; le cygne ramène une hostie que Lohengrin partage avec lui, après quoi les forces leur reviennent à tous deux. A Anvers on va à la rencontre de Lohengrin au son des cloches, car ies ecclésiastiques qui entourent Elsa tiennent le cygne pour un ange, etc. I