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qu’il lui était impossible, pour des raisons toutes matérielles, d’entreprendre la composition d’œuvres de longue haleine. Il est à remarquer d’ailleurs que, dans la dernière partie de sa vie, Nietzsche a composé ses ouvrages d’une manière beaucoup plus rigoureuse que pendant la période de 1878 à 1882. La Généalogie de la morale, malgré sa division extérieure en aphorismes, est en réalité un véritable « traité » ; de même la Volonté de puissance eût été, à en juger par la première partie qui a été seule achevée, beaucoup plus systématique que les ouvrages antérieurs. Ce n’est donc pas, je crois, fausser la pensée de Nietzsche que de la présenter sous la forme, nécessairement un peu artificielle, d’une sorte de doctrine philosophique, encore qu’il ne l’ait jamais exposée lui-même de cette manière-là. Je m’efforcerai d’ailleurs, en multipliant les citations, de donner aux lecteurs une idée aussi vivante que possible de cette œuvre si colorée et si vibrante, si exempte de tout pédantisme scolastique, et où l’on sent, à chaque page, que l’auteur a mis toute son âme, tout son cœur, dans l’étude de problèmes qui, suivant son expression pittoresque, « ont une carapace hérissée de piquants et ne sont point faits pour être caressés et flattés ».