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« Mère Sainte-Ursule, j’ai à vous parler en particulier. »

La nonne changea de couleur, et fut évidemment déconcertée.

« À moi ? » répliqua-t-elle d’une voix défaillante.

La supérieure lui fit signe de venir et se retira. La mère Sainte-Ursule obéit. Bientôt après, la cloche du réfectoire sonna une seconde fois, les nonnes quittèrent la grille, et Théodore resta libre d’emporter son butin. Ravi d’avoir enfin quelque nouvelle à donner au marquis, il vola plutôt qu’il ne courut à l’hôtel de Las Cisternas. En peu de minutes il fut près du lit de son maître, la corbeille en main. Lorenzo était dans la chambre, s’efforçant de consoler son ami d’un malheur que lui-même il ne sentait que trop cruellement. Théodore raconta son aventure, et l’espoir qu’avait fait naître le cadeau de la mère Sainte-Ursule. Le marquis se dressa sur son séant : le feu qui, depuis la mort d’Agnès, s’était éteint dans sa poitrine, se ranima, et ses yeux étincelèrent d’anxiété. Les émotions que trahissait la physionomie de Lorenzo n’étaient guère plus faibles, et il attendait la solution de ce mystère avec une impatience inexprimable. Raymond prit la corbeille des mains de son page ; il en vida le contenu sur son lit, et examina tout avec une attention minutieuse. Il espérait trouver une lettre au fond ; rien de semblable n’apparut : on recommença les perquisitions, mais sans plus de succès. Enfin, don Raymond remarqua qu’un des coins de la doublure de satin bleu était décousu : il l’arracha promptement, et en tira un petit morceau de papier, qui n’était ni plié, ni cacheté. Il était adressé au marquis de Las Cisternas, et contenait ce qui suit :

« Ayant reconnu votre page, je me hasarde à vous envoyer ce peu de lignes. Procurez-vous auprès du cardi-